Page:Fables chinoises du IIIe au VIIIe siècle de notre ère.djvu/44

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Alors la vieille mère alla de lieu en lieu
Quand elle demandait son aumône de feu :
— Avez-vous eu des morts chez vous ? ajoutait-elle,
On répondait partout la même ritournelle :
— Nos ancêtres sont morts, ainsi que nous mourrons,
Nous avons vu mourir nous aussi, nous pleurons. —
Lorsqu’elle eut visité mainte et mainte demeure,
Sans en découvrir une où quelque être ne meure
Elle s’en fut auprès du Maître, du Bouddha ;
Au Saint, au Vénéré du monde, elle accorda
Qu’elle avait fait beaucoup de recherches avides
Mais qu’elle revenait de partout les mains vides :
— Partout, dit-elle, hélas j’ai répété mon vœu ;
Nulle part on n’a pu me remettre de feu
Car, dans aucun village et dans aucune ville,
N’est maison où la mort n’ait trouvé quelque asile.
Le Bouddha répondit : — C’est notre commun sort.
Est-il un seul vivant qui résiste à la mort ?
Depuis toujours, depuis les premiers temps du monde,
Mère, il en est ainsi. Sur quelle erreur se fonde
Ton aveugle désir et ta prétention,
Pour ton fils ou pour toi, d’être l’exception ? —
Alors la vieille ouvrit sa pauvre intelligence
Et connut la raison de notre impermanence.
Le sens des livres saints, Bouddha le lui donna ;