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Page:Fabre - La Plante (1876).djvu/244

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LA PLANTE

boration de la séve ? Creusez avec soin la terre au pied d’une orobanche et vous aurez le mot de l’énigme : vous trouverez la tige soudée aux racines de quelque plante voisine. Les orobanches sont parasites : le défaut de coloration verte les mettant dans l’impuissance de retirer par elles-mêmes du gaz carbonique le charbon qui leur est nécessaire, elles vivent aux dépens d’autres végétaux, dont elles détournent la séve à leur profit. Chaque espèce a sa victime de prédilection : à l’une, il faut le thym ; à une autre, le chanvre ; à d’autres encore, le trèfle, le lierre, le lin, etc. Si la plante nourricière lui manque, la plante parasite est dans l’impossibilité absolue de se développer. Semons, par exemple, dans un pot des graines d’orobanche. Tous nos soins de semis échouent, aucune semence n’arrive à bien. Recommençons en semant pêle-mêle des graines d’orobanche et des graines d’une autre plante appropriée aux goûts de la première, soit de trèfle. Maintenant tout lève, l’orobanche soude sa tige aux racines du trèfle, vit de l’acide carbonique décomposé par son nourricier vert, et prospère tandis que ce dernier dépérit épuisé.

Parmi les végétaux que le défaut de coloration verte rend inhabiles au travail de la séve et réduit à vivre en parasites sur d’autres plantes, je vous citerai la cuscute, touffe de filaments rougeâtres qui s’enchevêtrent au chanvre, au thym, au lin, à la vigne ; le sucepin, de couleur jaune, qui s’établit sur les racines des arbres forestiers, du pin en particulier ; la clandestine, à grandes fleurs pourpres, et dont la tige souterraine et blanchâtre suce au bord des eaux les racines des aulnes ; le cytinet, d’un jaune rougeâtre, qui s’implante sur les souches des cistes. Dans tous, les feuilles sont réduites à des écailles, aussi grossières que les enveloppes d’un bourgeon.