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Page:Fabre - Les Auxiliaires (1890).djvu/111

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SUR LES ANIMAUX UTILES À L’AGRICULTURE

envierait à l’oiseau, ne manque jamais d’atteindre son but. Le cygne s’affaiblit, se lasse et perd tout espoir de salut ; mais alors son ennemi craint encore qu’il n’aille tomber dans l’eau du fleuve. Un coup des serres de l’aigle frappe la victime sous l’aile et la précipite obliquement sur le rivage.

« Vous ne verriez pas sans effroi le triomphe de l’aigle : il danse sur le cadavre, il enfonce profondément ses griffes d’airain dans le cœur du cygne mourant, il bat des ailes, il hurle de joie. Les dernières convulsions de l’oiseau l’enivrent. Il lève sa tête chauve vers le ciel, et ses yeux enflammés d’orgueil se colorent comme le sang. Sa femelle vient le rejoindre. Tous deux ils retournent le cygne, percent sa poitrine de leur ber, et se gorgent du sang encore chaud qui en jaillit. »

Émile. — Pauvre cygne !

XVIII

L’AUTOUR. — L’ÉPERVIER. — LES FAUCONS

Louis. — Que faire contre des ennemis comme l’aigle ?

Paul. — Les détruire nous-mêmes par tous les moyens en notre pouvoir, car nous n’avons à compter sur aucun secours. Ils sont les tyrans de l’air ; aucun oiseau n’oserait les attaquer. La destruction des nids est le moyen le plus sûr de mettre fin aux ravages qu’ils font parfois dans les troupeaux. Mais ce n’est pas entreprise sans péril que d’atteindre l’aire de l’aigle pour tordre le cou aux aiglons. Les bergers des Pyrénées s’y mettent à deux, l’un armé d’une carabine à double coup, l’autre d’une longue pique. Au petit jour, lorsque l’aigle est déjà en chasse, les deux dénicheurs arrivent sur le haut de l’escarpement où l’aire est établie. Le premier, la carabine armée, se poste au sommet du rocher pour faire feu sur l’aigle à son retour ; le second, la pique à la ceinture, descend de roc en roc jusqu’à l’aire et enlève les aiglons, trop jeunes encore pour opposer une sérieuse défense. Au premier cri de détresse, la mère accourt furieuse et se précipite sur l’homme, qui la reçoit à coups de pique, tandis que son camarade atteint l’oiseau d’une balle. Le mâle, qui planait au-dessus des nuées,