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obstinée à se piquer avec les crochets des mandibules. Soit fatigue, soit convention, le combat fut suspendu ; il y eut une trêve de quelques instants, et chaque athlète, s’éloignant un peu, vint se replacer dans sa posture menaçante. Cette circonstance me rappela que, dans les combats singuliers des chats, il y a aussi des suspensions d’armes. Mais la lutte ne tarda pas à recommencer avec plus d’acharnement entre mes deux Tarentules. L’une d’elles, après avoir balancé la victoire, fut enfin terrassée et blessée d’un trait mortel à la tête. Elle devint la proie du vainqueur, qui lui déchira le crâne et la dévora. Après ce combat singulier, j’ai conservé vivante pendant plusieurs semaines la Tarentule victorieuse. »

Ma région ne possède pas la Tarentule ordinaire, l’Aranéide dont le savant des Landes vient de nous raconter les mœurs ; mais elle a son équivalent à ventre noir ou Lycose de Narbonne, moitié moindre que la première, parée de velours noir à la face inférieure, sous le ventre surtout, chevronnée de brun sur l’abdomen, annelée de gris et de blanc sur les pattes. Les terrains arides, caillouteux, à végétation de thym grillée par le soleil, sont sa demeure favorite. Dans mon laboratoire de l’harmas, il y a bien une vingtaine de terriers de cette Lycose. Rarement je passe à côté de ces repaires sans donner un coup d’œil au fond des clapiers, où luisent, comme des diamants, les quatre gros yeux, les quatre télescopes des recluses. Les quatre autres, beaucoup plus petits, ne sont pas visibles à cette profondeur.

Si je veux richesses plus grandes, je n’ai qu’à me rendre à quelques cents pas de ma demeure, sur le