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écarte l’autre tant qu’il peut. Je ne le vois pas dégainer. L’Aranéide cependant, embrassant toute la circonférence de l’enceinte avec ses longues pattes, se hisse un peu sur la glissante surface et s’éloigne autant que possible de son adversaire. Là, immobile, elle attend les événements, bientôt troublés par le remuant Bourdon. Si celui-ci occupe le dessus, la Tarentule se fait bouclier en rassemblant ses pattes, qui tiennent l’ennemi à distance. Bref, sauf de vifs démêlés lorsque les deux champions sont en contact, rien ne se passe qui mérite attention. Pas de duel à mort dans l’étroite arène de l’éprouvette, non plus que dans l’ample cirque du flacon. Toute peureuse, une fois hors de chez elle, l’Aranéide refuse obstinément le combat ; et ce n’est pas le Bourdon, si étourdi qu’il soit, qui s’avisera de commencer. Je renonce à l’expérimentation en cabinet.

Il faut aller sur les lieux mêmes et présenter le duel à la Tarentule, pleine d’audace en son château fort. Seulement, au Bourdon, qui pénètre dans le terrier et dérobe sa fin aux regards, il est nécessaire de substituer un autre adversaire, non enclin à pénétrer sous terre. En ce moment abonde dans le jardin, sur les fleurs de la Sauge Sclarée, l’un des plus robustes et des plus gros hyménoptères de ma région, le Xylocope violet, à costume de velours noir et gaze des ailes pourpre. Sa taille de près d’un pouce dépasse celle du Bourdon. Son coup de dague est atroce et produit une enflure longtemps douloureuse. J’ai à ce sujet des souvenirs précis, qui m’ont coûté cher. Voilà vraiment un antagoniste digne de la Tarentule, si je parviens à le lui faire accepter. J’en mets un certain nombre, un