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Sans être grave, l’effet du venin de la Ségestrie est nettement accentué. C’est quelque chose qu’une piqûre provoquant douleur vive et gonflement avec rougeur d’érysipèle. Si l’expérience de Dugès nous rassure pour notre propre compte, il n’en est pas moins vrai que le venin de l’Araignée des caves est terrible pour les insectes, soit à cause de la faible masse de la victime, soit à cause d’une efficacité spéciale sur une organisation très différente de la nôtre. Un Pompile, bien inférieur à la Ségestrie en force et en grosseur, guerroie cependant contre l’Araignée noire et parvient à se rendre maître de ce redoutable gibier. C’est le Pompile apical (Pompilus apicalis V. Lind.), guère plus long que l’Abeille domestique mais beaucoup plus fluet. Il est d’un noir uniforme ; ses ailes sont rembrunies, avec le bout transparent. Suivons-le dans ses expéditions contre la vieille muraille habitée par la Ségestrie, suivons-le des après-midi entières pendant les chaleurs de juillet, et armons-nous de patience, car la capture du gibier, périlleuse comme elle est, doit être longue pour l’hyménoptère.

Le chasseur d’Araignées explore minutieusement le mur ; il court, il sautille, il vole ; il va et revient, il passe et repasse. Les antennes sont vibrantes ; les ailes, relevées sur le dos, battent continuellement l’une contre l’autre. — Ah ! le voici tout près d’un entonnoir de Ségestrie. À l’instant l’Aranéide, jusque-là non visible, apparaît à l’entrée du tube ; elle étale au dehors ses six pattes de devant, prête à recevoir le chasseur. Loin de fuir devant la redoutable apparition, elle guette qui la guette, toute disposée à faire de son ennemi une proie. Devant cette fière contenance, le Pompile