Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/244

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vol défie celui du ravisseur. L’Hyménoptère doit fondre à l’improviste sur son gibier, sans mesurer l’attaque, sans ménager les coups, comme le fait l’Autour chassant dans les guérets. Mandibules, griffes, dard, toutes les armes doivent concourir à la fois à la chaude mêlée pour terminer au plus vite une lutte où la moindre indécision laisserait à l’attaqué le temps de fuir. Si ces prévisions sont d’accord avec les faits, la capture des Bembex ne saurait être qu’un cadavre ou du moins une proie blessée à mort.

Eh bien, ces prévisions sont justes : l’attaque du Bembex se fait avec une fougue que ne désapprouverait pas l’oiseau de proie. Surprendre l’Hyménoptère en chasse n’est pas chose aisée ; vainement on s’armerait de patience pour épier le ravisseur aux environs du terrier : l’occasion favorable ne se présenterait pas, car l’insecte s’envole au loin, et il est impossible de le suivre dans ses rapides évolutions. Ses manœuvres me seraient sans doute inconnues sans le concours d’un meuble dont certes je n’avais jamais attendu pareil service. Je veux parler de mon parapluie, qui me servait de tente contre le soleil au milieu des sables du bois des Issarts.

Je n’étais pas seul à profiter de son ombre ; ma société était habituellement nombreuse. Des Taons d’espèces diverses venaient se réfugier sous le dôme de soie, et se tenaient, paisibles, qui d’ici, qui de là, sur l’étoffe tendue. Leur compagnie me faisait rarement défaut lorsque la chaleur était accablante. Pour tromper mes heures d’inaction, j’aimais à voir leurs gros yeux dorés, qui reluisaient comme des escarboucles à la voûte de mon abri ; j’aimais à suivre leur grave marche quand un point trop échauffé au plafond les obligeait de se déplacer un peu.

Un jour : pan ! La soie tendue résonne comme la membrane d’un tambour. Quelque gland peut-être vient