Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/272

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seur d’une noix. Mon travail qui, par rapport au Bembex, dépasse ce que sont pour nous les monuments mégalithiques de la Bretagne, les alignements de menhirs de Carnac, est inefficace pour tromper l’insecte mutilé. L’Hyménoptère privé d’antennes retrouve son entrée au milieu de ma mosaïque avec la même facilité que l’avait fait en d’autres conditions l’insecte pourvu de ces organes. Je laissai la fidèle mère rentrer en paix cette fois dans son logis.

Les lieux transformés d’aspect coup sur coup à quatre reprises ; les devants de la demeure changés dans leur coloration, leur odeur, leurs matériaux ; la douleur enfin d’une double blessure, tout avait échoué pour dérouter l’Hyménoptère, pour le faire simplement hésiter sur le point précis de sa porte. J’étais à bout de stratagèmes, et je comprenais moins que jamais comment l’insecte, s’il n’a pas un guide spécial dans quelque faculté de nous inconnue, peut se retrouver lorsque la vue et l’odorat sont mis en défaut par les artifices dont je viens de parler.

À quelques jours de là, une expérience me sourit pour reprendre le problème sous un nouveau point de vue. Il s’agit de mettre à découvert dans toute son étendue, sans trop le dénaturer, le terrier des Bembex, opération à laquelle se prêtent aisément le peu de profondeur de ce terrier, sa direction presque horizontale et la faible consistance du sol où il est creusé. À cet effet, le sable est peu à peu raclé avec la lame d’un couteau. Ainsi privé de sa toiture d’un bout à l’autre, la demeure souterraine devient un demi-canal, une rigole, droite ou courbe, d’une paire de décimètres de longueur, libre au point où était la porte d’entrée, terminée en cul-de-sac à l’autre bout, où gît la larve au milieu de ses victuailles.

Voilà le domicile à découvert, en pleine lumière, sous les rayons du soleil. Comment se comportera la mère à son retour ? Divisons la question suivant le