Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/8

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Mais, en général, leur coloration est le noir. C’est aux régions tropicales qu’appartiennent les bousiers splendidement costumés, véritables bijoux vivants. Sous les bouses de chameau, la Haute-Égypte nous présenterait tel Scarabée qui rivalise avec le vert éclatant de l’émeraude ; la Guyane, le Brésil, le Sénégal, nous montreraient tels Copris d’un rouge métallique, aussi riche que celui du cuivre, aussi vif que celui du rubis. Si cet écrin de l’ordure nous manque, les bousiers de nos pays ne sont pas moins remarquables par leurs mœurs.

Quel empressement autour d’une même bouse ! Jamais aventuriers accourus des quatre coins du monde n’ont mis telle ferveur à l’exploitation d’un placer californien. Avant que le soleil soit devenu trop chaud, ils sont là par centaines, grands et petits, pêle-mêle, de toute espèce, de toute forme, de toute taille, se hâtant de se tailler une part dans le gâteau commun. Il y en a qui travaillent à ciel ouvert, et ratissent la surface ; il y en a qui s’ouvrent des galeries dans l’épaisseur même du monceau, à la recherche des filons de choix ; d’autres exploitent la couche inférieure pour enfouir sans délai leur butin dans le sol sous-jacent ; d’autres, les plus petits, émiettent à l’écart un lopin éboulé des grandes fouilles de leurs forts collaborateurs. Quelques-uns, les nouveaux venus et les plus affamés sans doute, consomment sur place ; mais le plus grand nombre songe à se faire un avoir qui lui permette de couler de longs jours dans l’abondance, au fond d’une sûre retraite. Une bouse, fraîche à point, ne se trouve pas quand on veut au milieu des plaines stériles du thym ; telle aubaine est une vraie bénédiction du ciel ; les favorisés du sort ont seuls un pareil lot. Aussi les richesses d’aujourd’hui sont-elles prudemment mises en magasin. Le fumet stercoraire a porté l’heureuse nouvelle à un kilomètre à la ronde, et tous