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XVIII

LE SCORPION LANGUEDOCIEN. — L’ALIMENTATION

J’apprends d’abord que, malgré son arme terrible, signe probable de brigandage et de goinfrerie, le Scorpion languedocien est un mangeur d’extrême frugalité. Lorsque je le visite chez lui, parmi les rocailles des collines voisines, je fouille avec soin ses repaires dans l’espoir d’y trouver les reliefs d’une ripaille d’ogre, et je n’y rencontre que les miettes d’une collation d’ermite ; habituellement même je n’y récolte rien du tout. Quelques élytres vertes d’une punaise des bois, des ailes de Fourmi-Lion adulte, des anneaux disjoints d’un chétif Criquet, à cela se bornent mes relevés.

La bourgade de l’enclos, assidûment consultée, m’en apprend davantage. À la façon d’un valétudinaire qui vit de régime et mange à ses heures, le Scorpion a son époque d’alimentation. Pendant six ou sept mois, d’octobre en avril, il ne sort pas de sa demeure, quoique toujours dispos et prompt à l’escrime de la queue. En cette période, si je mets à sa portée quelque victuaille, dédaigneusement il la refuse ; du revers de la queue il la balaye hors du terrier sans y accorder autre attention.

C’est vers la fin de mars que s’éveillent les premières velléités de l’estomac. À cette époque, visitant les huttes, il m’arrive de trouver tantôt l’un, tantôt l’autre de