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LE SCORPION LANGUEDOCIEN

agonise de la même façon misérable. Nous y reviendrons.

Voulons-nous voir, au contraire, un stoïque, sachant mourir de façon décente ? Faisons piquer l’Orycte nasicorne, vulgairement le Rhinocéros. En robuste prestance, nul de nos Coléoptères ne le vaut. Malgré la corne de son nez, c’est un pacifique, hôte, en son âge larvaire, des vieilles souches d’olivier. Lardé par le Scorpion, il semble d’abord n’avoir rien éprouvé. Comme toujours, il déambule gravement et bien équilibré.

Mais voici que soudain l’atroce virus le travaille. Les pattes n’obéissent plus avec l’habituelle correction ; le blessé chancelle et tombe sur le dos. Il ne se relèvera plus. Dans cette posture, pendant trois et quatre jours, sans autre lutte que de vagues gestes de moribond, tout doucement il se laisse défaillir.

Les Papillons, à leur tour, comment se comportent-ils ? Ces délicats doivent être fort sensibles à la piqûre ; avant l’épreuve, j’en suis persuadé. Par scrupule d’observateur, expérimentons cependant. Un Machaon, un Vulcain, atteints par le dard, à l’instant périssent. Je m’y attendais. Le Sphinx de l’euphorbe, le Sphinx rayé, ne résistent pas davantage ; ils sont foudroyés, eux aussi, tout comme la Libellule, la Lycose et la Mante.

Mais, à ma vive surprise, le Grand-Paon semble invulnérable. Il est vrai que l’attaque est difficultueuse. Le dard s’égare dans la molle bourre qui, chaque fois, vole en flocons. Malgré des coups multiples, je ne suis pas sûr que l’aiguillon ait réellement pénétré. Je dépile alors le ventre, je mets à nu l’épiderme. Cette précaution prise, je vois nettement l’arme plonger. La piqûre