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Page:Fabre - Souvenirs entomologiques edition7 Serie 9.djvu/72

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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

loin d’avoir l’ampleur du ballon ; les entassés s’y fausseraient les pattes au moment de les extraire de leurs fourreaux. La famille sort donc au complet et va s’établir à proximité sur quelque rameau.

C’est un campement provisoire où, filant en commun, les jeunes ont bientôt ourdi une tente à clairevoie, séjour d’une semaine environ. Dans ce reposoir de fils entre-croisés s’opère la mue. Les peaux rejetées s’amassent au bas de la demeure ; sur les escarpolettes d’en haut s’exercent et prennent des forces les récents dépouillés. Enfin, à mesure que la maturité se fait, ils partent, maintenant les uns, maintenant les autres, petit à petit et toujours de façon discrète. D’audacieuses envolées sur l’aérostat d’un fil, il n’y en a pas. Le voyage s’accomplit par modestes étapes.

Suspendue à son fil, l’Araignée se laisse choir, suivant la verticale, à la profondeur d’un empan. Un souffle d’air la fait osciller à la manière d’un pendule, parfois la chasse contre un rameau voisin. C’est un pas de fait dans la dispersion. Au point atteint, nouvelle chute, nouvelle oscillation pendulaire suivie d’un accostement en parage plus éloigné. Par brèves bordées, car le fil n’est jamais bien long, la petite Épeire voit ainsi du pays, jusqu’à la rencontre d’une localité qui lui convienne.

Si le vent a de la force, l’expédition s’abrège : le fil pendulaire se rompt, et la bestiole est transportée à quelque distance par le véhicule de son cordon.

En somme, bien qu’au fond la tactique de l’exode se maintienne à peu près la même, les deux filandières de ma région les mieux versées dans l’art des sacoches maternelles n’ont pas répondu à mes espérances. Pour