Page:Faguet - En lisant Nietzsche, 1904.djvu/107

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Jeu, si l’on veut, et jeu très sérieux et honorable ; mais donner à ceux qui jouent ainsi la primauté dans l’humanité, leur confier l’humanité, il n’y a pas à cela une raison suffisante et cela a même quelque chose de ridicule : « Les adeptes de la science font l’effet de gens qui auraient projeté de creuser dans la terre un trou vertical la traversant de part en part. Le premier s’aperçoit qu’en travaillant pendant sa vie entière avec la plus grande assiduité, il ne pourrait arriver qu’à percer une infime partie de l’énorme profondeur et que, du reste, le résultat de son travail serait comblé et anéanti sous ses yeux par le travail de son voisin. »

Le savant, le rationaliste, l’homme théorique, est donc un homme dégénéré, un sous-homme. Vous avez lu Faust. L’avez-vous compris ? C’est la condamnation en trois points de l’homme théorique. Faust, d’abord est l’homme moderne, l’homme théorique, l’homme qui serait absolument inintelligible à un Grec d’avant Socrate ; c’est l’homme dévoré de la passion du savoir, dévoré de la passion de la « culture ». — Il en aperçoit la vanité et il fait une expérience de la vie sentimentale — Elle ne lui réussit pas beaucoup, la vie sentimentale — Alors, après s’être jeté dans la contemplation de l’antiquité hellénique et y avoir fait long séjour, à quoi est-ce qu’il aboutit ? À la vie d’action, à la vie qui ne rai-