Page:Faguet - En lisant Nietzsche, 1904.djvu/122

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mais qui est renouvelée par une verve d’éloquence et de sarcasme, aussi par une pénétration psychologique, aussi par une vigueur de dialectique, qui en feraient un petit livre incomparable, si elle n’était disséminée en vingt endroits de ses ouvrages. Je ne vais guère faire autre chose que la ramasser. Les citations, ici comme partout où Nietzsche a la « vision nette », valent beaucoup mieux que l’interprétation que quiconque en pourrait faire.

Vous dites que voire conscience vous ordonne impérieusement de faire telle chose et qu’il vous est pénible de lui désobéir. Vous dites : « lorsque l’homme décide que cela est bien ainsi ; lorsqu’il conclut que c’est pour cela qu’il faut que cela soit et enfin lorsqu’il fait ce qu’il a ainsi reconnu comme juste et nécessaire, alors l’acte est moral. » Voilà ce que vous dites. « Mais, mon ami, tu me parles là de trois actions, au lieu d’une, car ton jugement : cela est bien ainsi, est un premier acte. » Et cet acte est arbitraire ou, au moins, n’est pas contrôlé. « Pourquoi considères-tu cela », à quoi tu songes, « comme juste ? Parce que ma conscience me l’indique » comme juste. — Mais pourquoi considères-tu ta conscience comme infaillible ? Pourquoi ne prends-tu pas conscience de ta conscience ? Pourquoi n’analyses tu pas sa décision ? « Ton jugement : cela est bien ainsi, a une première histoire