Page:Faguet - En lisant Nietzsche, 1904.djvu/219

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L’espèce inférieure, encore, « désapprenant la modestie, enfle ses besoins », ses idées générales qui ne sont que des formes de ses besoins, « jusqu’à en faire des valeurs cosmiques et métaphysiques » ; les philosophes, si elle en produit, ce qui arrive, sont admirables à opérer cette transformation ; ils donnent pour principes généraux à guider l’humanité ce qui n’est que besoins de la plèbe, désirs de la plèbe, jalousies de la plèbe, aspirations confuses de la plèbe vers le bonheur particulier qui lui convient.

L’espèce inférieure, encore, invente de véritables sophismes, comme celui de l’égalité des hommes, sans qu’on ait jamais pu savoir sur quoi, sur quelles données scientifiques, historiques, ethnographiques, éthiques, et supposez tout ce que vous voudrez, une pareille absurdité ait jamais pu s’appuyer. Cette idée d’égalité, l’espèce inférieure, soit la tire de la religion, soit invente une religion pour la confirmer. S’il existe une religion qui affirme que tous les hommes sont égaux devant les dieux, elle en conclut peu à peu que par conséquent — quelle conséquence ! — tous les hommes doivent être égaux socialement. Ou, si elle a affirmé un jour que tous les hommes, parce qu’ils sont hommes — quelle raison ! — sont égaux, elle imagine une religion qui donne à cette puérilité