Page:Faguet - En lisant Nietzsche, 1904.djvu/294

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aussi : « Supprimons-nous l’idée de but dans le processus et affirmons-nous le processus malgré cela ? » Peut-être. « Ce serait le cas si, dans le cercle de ce processus, à chaque moment de celui-ci, quelque chose était atteint — et que ce fût toujours la même chose. Spinoza a conquis une position affirmative de ce genre, en ce sens que pour lui chaque moment a une nécessité logique, et il triomphe d’une telle conformation du monde au moyen de son instinct logique fondamental. » — Nietzsche dit encore et avec profondeur : « Parce qu’on a considéré la conscience comme mesure, comme valeur supérieure de la vie, au lieu d’y voir un instrument et un cas particulier dans la vie générale, parce qu’on a fait le faux raisonnement de a parte ad totum, tous les philosophes cherchent instinctivement à imaginer une participation consciente à tout ce qui arrive, un esprit, un Dieu. Mais il faut leur faire comprendre que c’est précisément par là que l’existence devient une monstruosité ; qu’un Dieu et une sensibilité universelle seraient quelque chose qui ferait condamner absolument l’existence. Nous avons éliminé la conscience universelle… c’est cela même qui nous a procuré un grand soulagement. De la sorte, nous ne sommes plus forcés d’être pessimistes. Le plus grand reproche que nous adressions à la vie, c’était l’existence de Dieu. » — Et