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XVIIIe ET XIXe SIÈCLES : FRANCE


Les Poètes célèbres
Leconte de Lisle, poète philosophe, épris de

la littérature indienne, épris de pessimisme, de goût du néant et de soif de la mort, s’imposant à l’admiration par une forme sculpturale et par un rythme majestueux ; Sully Prudhomme philosophe encore, surtout psychologue, maniant l’élégie lyrique avec un grand art et surtout la pénétrant d’une sensibilité grave, triste et profonde qui l’aurait fait aimer et admirer avec respect de Catulle, de Tibulle et de Lucrèce ; François Coppée, le poète des joies et des douleurs des humbles, très habile versificateur du reste et d’une sincérité candide qui fait oublier qu’il a de l’art ; Baudelaire, curieux de sensations rares et parfois artificielles, d’un style extrêmement laborieux, mais arrivant quelquefois à produire une forte impression morbide ou lugubre, considéré, par toute une école qui existe encore, comme un des plus grands poètes de toute la littérature française ; Verlaine, extrêmement inégal, souvent détestable et méprisable, tout à coup charmant ou touchant, ou d’un sentiment religieux qui fait songer à un clerc du moyen âge ; Catulle Mendès, pur romantique, pur virtuose, mais d’une habileté de versificateur étonnante. A ces poètes s’opposèrent des raffinés très curieux qui voulaient renouveler l’art poétique en attribuant plus de valeur au son des mots qu’à leur sens, faire de la poésie une musique et d’une façon générale et surtout, peut-être, être difficilement compris. Ils se donnèrent le nom de symbolistes et acceptèrent celui de décadents ; ils tenaient pour leur chef ou pour un ami leur faisant honneur, Stéphane

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