Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/139

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C’était un bon républicain ; c’était un despotiste. A son point de vue il raisonnait très bien. Tout ce qui a une forte vie morale crée des embarras au gouvernement. Un gouvernement ne peut pas aimer ni quelqu’un ni quelque chose doué d’une forte vie morale. Il ne peut pas aimer la moralité. D’où il suit que ceci précisément qui fait la force d’une nation fait la terreur du gouvernement et lui est en défiance, et c’est une plaisante antinomie.

Mais pourquoi en est-il ainsi ? Mais encore et toujours parce que le gouvernement fait ce qui ne le regarde pas, ce qui l’amène à faire tout de travers ce qu’il fait en dehors de sa fonction naturelle, et à le faire d’une façon nuisible aux individus, à la nation et à lui-même. Il est un organe de police et de défense ; il s’avise d’être un organe de pensée, d’enseignement, de moralisation, d’édification, que sais-je ? Tout cela il le fait mal ; mais il y a pis : n’aimant pas ceux qui veulent le faire à sa place parce qu’il le fait à la leur, et il le fait mal et il n’aime pas ceux qui le font bien ou le feraient bien ; et en définitive personne ne le fait, et il est assez content que personne ne le fasse ; ou tout le monde le fait, chacun à moitié, et c’est une confusion et une malfaçon universelle.

Remarquez, par exemple, dans ce cas particulier de la religion, remarquez que chez nous il y a deux clergés. Il y a un clergé d’Etat et un clergé