Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/141

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homme qui n’est pas moi, et qui, ce qui est effrayant, est an étranger ! »

Je crois qu’il ne faut pas s’effrayer autant que cela. Je suppose que l’influence d’Herbert Spencer eût été assez grande pour que sa doctrine devint une religion ; je suppose que cette religion eût été adoptée en France et que, par conséquent, nous fussions un certain nombre de Français à avoir pour chef religieux un Anglais. En quoi cela nous empècherait-il d’être des Français très patriotes et des citoyens très obéissants à notre gouvernement ? Ces choses-là n’ont aucun rapport ou du moins ont des rapports trop éloignés pour qu’il soit très intelligent d’en tenir compte. Voit-on que les Américains catholiques soient moins attachés à leur patrie et moins fiers d’être Américains parce qu’ils se rattachent à un cardinal italien comme à leur chef spirituel ? Voit-on, remarquez ceci, que les Allemands catholiques, parce qu’ils se rattachent à un cardinal italien comme à leur chef spirituel, soient moins patriotes allemands et nous détestent moins que ne font leurs compatriotes protestants ? Point du tout. Ils sont catholiques, ils relèvent du Pape ; ils nous savent catholiques ; mais ils nous détestent cordialement comme l’ennemi héréditaire.

Il n’y aurait qu’un cas où le fait d’être, dans un pays, un grand nombre à avoir pour chef spirituel un étranger serait, à mon avis, assez grave. Ce