Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/254

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

A travers tout le xixe siècle, le développement et le progrès de l’esprit révolutionnaire n’a guère été que le développement et le progrès de l’esprit égalitaire, et l’esprit de liberté n’a guère été invoqué que par les adversaires mêmes de la Révolution, ou plutôt, selon les régimes, il a été invoqué tantôt par les uns, tantôt par les autres, l’étant toujours par ceux qui étaient en minorité, jamais par ceux qui étaient vainqueurs, jamais du reste sincèrement ni par les uns ni par les autres et le libéralisme étant successivement l’hypocrisie de tous les partis.

— Ceci est un fait ; mais en quoi, en logique, en quoi, essentiellement, en quoi, par soi-même, l’égalité est-elle un des ennemis de la liberté ?

— C’est précisément l’objet particulier de ce paragraphe. L’égalité est l’ennemie intime de la liberté, parce que tous les exercices de la liberté gênent l’égalité. Vous ne pouvez être libre qu’en théorie si vous ne voulez pas me gêner horriblement, moi égalitaire. Vous ne pouvez pas exercer un seul droit de liberté sans me gêner, moi égalitaire, d’une façon insupportable.

Vous exercez la liberté de l’enseignement. Qu’est-ce à dire ? Que vous, homme instruit, vous vous associez à quelques autres hommes instruits pour élever et instruire des enfants. Je sais parfaitement ce que vous faites. Vous créez des surhommes ; vous créez des aristes, qui vont dépasser de