Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/325

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viser que les choses, que les choses abstraites, un crime, un délit, une infraction ; elle ne doit jamais viser les personnes. C’est donc là une loi qui n’a pas le caractère de la loi ; c’est, sans forcer le sens des mots, une loi illégale. Que diriez-vous si, le parti catholique étant vainqueur aux élections, il faisait une loi ainsi conçue : « La liberté d’association est reconnue pour les ecclésiastiques ; elle n’est pas admise pour les laïques. Les religieux s’associeront comme ils voudront ; les laïques devront, pour s’associer, demander l’autorisation du gouvernement et des Chambres, qui la leur refuseront ? » Vous vous indignez d’une si monstrueuse tyrannie cléricale. Mutato nomine, c’est précisément ce que vous avez fait, en votre qualité de cléricaux retournés, ce que vous êtes depuis Jean-Jacques Rousseau et Robespierre.

La liberté d’association n’existe pas en France du moment qu’elle n’existe pas pour tous les Français. « Il y a oppression contre le corps social quand un seul de ses membres est opprimé. » La Déclaration des Droits a raison, très précisément raison. Je n’ai pas la liberté d’association, je ne l’ai pas, puisque, si je me faisais prêtre, je ne l’aurais pas.

La liberté d’enseignement est traitée tout de même. Elle existe pour les laïques ; elle n’existe pas pour les religieux. En effet, on n’enseigne pas, ou l’on n’enseigne guère, et en vérité on n’enseigne