Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/42

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certains socialistes, quand les anarchistes, quand les Tolstoïsants crient à la fois : « A bas la guerre ! A bas la Patrie ! » Ils ont parfaitement raison. C’est le souvenir des guerres passées et la certitude des guerres futures qui maintient la patrie, qui maintient les patries. C’est la combativité humaine qui fait qu’il y a des patries. Si l’homme n’était pas un animal ambitieux et belliqueux, il n’y aurait pas de patrie à proprement parler. Il y aurait des pays, de petits pays, des fratries, bornées à une cité, à une montagne, à une vallée, à une plaine, à un groupe d’humains ayant non seulement la même langue, mais le même accent, ayant les mêmes habitudes de vie, le même caractère et se connaissant à peu près tous. La nation plus grande, la grande patrie ne se comprend absolument que par la nécessité toujours sentie de lutter contre un voisin ambitieux et naturellement conquérant et par l’impossibilité pour un petit peuple de lutter contre un grand et, attaqué par lui, de garder son indépendance.

En conséquence, quel est le but de l’État, du grand État ? Il en a deux, superposés. Il a celui qu’aurait un petit État, une fratrie ; il a, de plus, celui d’un État considérable, constitué pour la défense.

Je fais remarquer tout de suite qu’une antinomie assez forte naît précisément, naît tout de suite, de cette superposition. Ces deux buts ne sont pas,