conséquent, et en cette qualité, à se restreindre à ses fonctions naturelles, c’est-à-dire à ceci seulement pour quoi il a été institué, à ceci seulement que lui seul peut faire, à ceci seulement qui est tel que si l’Etat ne le faisait pas le pays disparaîtrait demain.
Ces fonctions naturelles, c’est la police, la justice et la défense. Tout le reste est prétention de l’Etat, non fonction de l’Etat. L’Etat, quand il fait quelque chose de tout ce reste, n’est plus un bon fonctionnaire, un bon serviteur de la patrie, il est un dilettante. Il s’occupe des choses dont je reconnais qu’il a le droit de s’occuper, mais qui ne le regardent pas. Il peut les bien faire, à la rencontre, mais il y a des chances pour qu’il les fasse mal, comme n’étant pas de son gibier, et, en tous cas, c’est trop de soin ; on ne lui en demande pas tant ; c’est un excès de zèle, et tout excès de zèle entraîne de fâcheuses habitudes de tracasseries et d’empressement, pénibles pour tout le monde.
Cette conception de l’Etat que je viens d’esquisser fera sourire de pitié certains philosophes qui ont, si je puis ainsi parler, le mysticisme administratif. Pour eux l’Etat n’est point un mal ; ce n’est point un mal nécessaire, ce n’est point un mal salutaire ; c’est un bien, c’est le souverain bien. Pour eux l’individu n’existe pas. Il n’existe qu’enchâssé dans l’Etat, qu’engrené dans l’Etat, qu’intégré dans l’Etat, qu’animé dans l’Etat. C’est l’Etat qui lui