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POUR QU’ON LISE PLATON

soi-même et de ne pas rougir de s’attacher à ceux qui valent mieux que lui. »

On honore son âme encore en fuyant tous les excès et, sans aller plus loin, l’excès dans la joie et la douleur, l’excès dans le rire et dans les larmes. Nous sommes convenus que les dieux ne doivent ressentir ni plaisir ni tristesse. Il faut être non point, sans doute, pareils aux dieux, mais imitateurs des dieux, en ne ressentant et ne voulant ressentir que des joies et des tristesses tempérées, en faisant bonne contenance dans les revers et aussi dans les succès, qui sont plus dangereux que les revers pour la paix de l’âme.

Les dieux ont voulu être tranquilles et que nous fussions inquiets. Il ne faut pas se roidir contre leur volonté ; mais il faut se conformer un peu à leur exemple qui ne laisse pas évidemment d’être aussi un peu leur volonté, car ils ne sauraient nous en vouloir de les prendre pour modèles. On n’arrivera point à l’ataraxie et peut-être ne serait-ce point un bien qu’on y arrivât ; mais on peut arriver à la modération, qui est un bien assurément.

Il faut réagir contre la tristesse, par cette considération que si elle est souvent très légitime, encore est-il que jamais elle ne sert de rien ; et il faut réagir contre la joie par cette considération qu’elle est un peu folle et qu’elle fait commettre