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POUR QU’ON LISE PLATON

il est incontestable que rien n’est plus faux. Mais il faut bien remarquer que l’amour, que quelques poètes disent aveugle, est un éternel chercheur et est en quête de la beauté à travers les imperfections, trop certaines, de la race humaine. C’est bien la beauté qu’il cherche et à quoi il s’attache, même dans un objet insuffisamment doué à cet égard, et il faut ajouter que là même où elle n’est pas, il la met, par une sorte d’imagination créatrice qui est en lui et que Ton peut appeler, si l’on veut, l’Illusion ; mais l’illusion est féconde et elle est productrice de beauté.

L’amour est donc un sens esthétique et un sens producteur de beauté. Ceci est très important, parce que la faculté esthétique a besoin d’être éveillée dans l’homme, en qui bien souvent elle dort.

Parce que l’amour est un sens esthétique, il est initiateur à toutes sortes de beautés. L’amant aime la beauté de ce qu’il aime et très souvent lui en attribue et lui en prête. Il est vrai. Mais voilà la faculté esthétique éveillée en lui et qui, souvent, du moins, ne se rendormira plus. L’amant aime la beauté de l’objet désiré, il l’aime beau et il le veut beau, il se veut beau lui-même et il le devient. Cet amour du beau restera en lui, de ce premier ébranlement et de cette première secousse.

Ne remarque-t-on pas que les enfants ont très