Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
224
POUR QU’ON LISE PLATON

connaître ; mais encore, l’amour-propre existant toujours, un minimum de désir de trouver doit être encore là où n’est pas le désir de savoir.

D’autant plus que la méthode suggestive trompe pour son bien l’esprit nonchalant. Elle a quelque chance de lui persuader qu’il ne l’est pas. Ne fût-ce que pour un temps court, c’est déjà quelque chose de gagné. A tous égards, l’éducation intellectuelle, c’est bien encore : cherchez avec moi. Le rôle de celui qui instruit sera donc un rôle d’excitateur et aussi de modérateur ; car s’il faut faire trotter devant soi le jeune esprit, aussi faut-il parfois l’arrêter et le faire douter de lui-même. Quelquefois il ne croit pas savoir alors qu’il sait, et quelquefois il croit savoir cependant qu’il ne sait rien. Dans ce dernier cas il faut l’embarrasser par une démonstration de son ignorance et l’engourdir, comme fait la torpille, ce qui le met dans une excellente disposition pour se contenir, d’abord, et ensuite pour chercher encore et mieux.

Il faut apprendre à apprendre et apprendre à douter pour mieux apprendre. La science est fille de l’étonnement et particulièrement de l’étonnement devant soi-même. Il faut que le disciple ne s’appuie que sur ses propres forces et doute de ses forces et s’étonne de ce qu’il découvre et de son infirmité à découvrir. Donc le maître n’est qu’un