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POUR QU’ON LISE PLATON

poèmes épiques connus n’étaient que des récits inventés pour démontrer quelque chose, n’étaient que de vastes fables et de grands apologues établis en vue de mettre en lumière une grande vérité morale.

Cependant, parce que le poème épique est lointain, parce qu’il est légendaire, parce qu’il nous montre des personnages appartenant à une autre civilisation que la nôtre, surtout parce qu’il est un récit et qu’un récit met toujours plus loin de nous les personnages présentés que ne ferait un poème dramatique, la foule, encore que très sévère sur la moralité générale du poème épique, lui passe assez facilement quelques choses insuffisamment satisfaisantes à cet égard et se contente assez communément que le poème épique ne blesse pas les mœurs et fasse vivre des personnages d’une certaine élévation.

Et si nous revenons enfin à la tragédie, c’est ici que le public se montre le plus exigeant. Il se montre plus exigeant que partout ailleurs, parce qu’il a affaire à un poème épique sur la scène, à un poème épique placé sous ses yeux et le touchant de plein contact, et à un poème épique représenté par des hommes vivants, ce qui le rapproche encore et ce qui fait que le poème est comme mêlé au public et le public au poème. Dès lors, la