Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/380

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
372
POUR QU’ON LISE PLATON

étroit parentage. Car la démocratie enfante la ploutocratie, et la ploutocratie favorise la démocratie. La démocratie enfante la ploutocratie en ce sens que, quand le peuple est le maître, les supérieurs ne pouvant pas employer, et aussi satisfaire, leur supériorité à commander, l’emploient et la satisfont à acquérir. Ils ne recherchent ni les honneurs, ni les dignités, ni le pouvoir, qui leur échappent et qu’ils sentent qui leur échappent ; ils se rabattent sur l’argent, qui est une jouissance, et ils laissent le pouvoir ou l’apparence du pouvoir aux politiciens, aux rhéteurs et aux sophistes.

Ou encore ils s’avisent, s’imaginent plutôt que l’argent, au sein d une plèbe besogneuse et avide, peut leur donner le pouvoir, qu’au fond ils ambitionnent toujours ; et ils ne l’obtiennent pas ou l’obtiennent rarement, ou n’en saisissent que les apparences ; mais ils s’acharnent à conserver et à augmenter leurs richesses dans l’espoir toujours renaissant de l’obtenir.

La démocratie enfante donc la ploutocratie et l’excite, du reste, à persévérer dans l’être.

Et, d’autre part, la ploutocratie favorise et caresse la démocratie. Ce qu’elle redoute d’instinct, c’est le mérite pauvre. Elle le redoute, le déteste et fait semblant de le mépriser. Elle le redoute ; car, lorsqu’il éclate, même au sein des démocra-