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religieux de la démocratie athénienne, c’est peut-être Paris au temps de la Ligue ».

Songez à cette fureur de consulter les oracles, à cette mantéomanie, si gaiement raillée par Aristophane (personnages pliant sous le faix des oracles amoncelés, comme Dandin sous le poids des sacs à procès), songez encore à cette terrible loi d’asébeia (impiété) qui parait n’avoir frappé à mort que Socrate et un ou deux autres, mais qui a contraint à fuir et à s’exiler pour ne pas périr Anaxagoras, malgré l’amitié et l’appui de Périclès, et Diagoras et Protagoras, et bien d’autres, dont vous trouverez la liste dans la Critique des idées religieuses en Grèce de M. Decharme.

Or, triomphante après la chute des « Trente Tyrans » et le retour des proscrits, la démocratie avait certainement voulu prendre sa revanche, ce qu’indique précisément la loi d’amnistie que Thrasybule réussit à faire voter. Mais la loi d’amnistie n’effaçait pas la loi d’asébeia et c’est par cette loi que la démocratie cléricale se donna la consolation de tuer au moins Socrate, lequel s’était moqué et des Dieux et des « mangeurs de fèves », c’est-à-dire des électeurs plébéiens.

On comprend donc que Platon n’aime ni les prêtres ni les Dieux et ait pour la mythologie et les mythologues aussi peu de goût que possible. Sans