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PROPOS DE THÉATRE

à très peu près éliminée de la « haute comédie » pour toutes les raisons que j’ai dites, c’est dans le vaudeville qu’elle s’était réfugiée.

Rien n’est plus différent de ce que nous appelons le vaudeville aujourd’hui que le vaudeville de 1825. Nous n’appelons plus guère vaudeville, aujourd’hui, que la pièce à quiproquos. Dès qu’une pièce légère est sans quiproquos, nous l’appelons une comédie. Le vaudeville de 1825 est une petite comédie, portant sur les ridicules du jour, spirituelle, gaie, mêlée de couplets. C’est une petite comédie.

Or, comme elle n’avait pas de prétentions, ni les acteurs, qui n’étaient pas les sociétaires du Théâtre-Français, mais les petits acteurs des boulevards, ne la dédaignaient et ne l’empêchaient de naître et de croître ; ni les « connaisseurs », qui n’y allaient pas, ne l’assommaient de leurs hautains mépris ; ni enfin les censeurs ne la gênaient beaucoup : un vaudeville, cela ne tire pas à conséquence.

Et, par cette porte basse, la comédie rentrait dans le monde théâtral et dans le monde littéraire. Les Scribe et les Mazères ont commencé par le vaudeville, très modestement et très utilement pour leur développement littéraire et pour leur gloire. Scribe n’a fait que des vaudevilles pendant une bonne dizaine d’années. Au point de vue du métier, il se faisait la main ; au point de vue de l’art, il prenait le meilleur chemin. Il se préparait à la grande comédie beaucoup mieux que s’il eût, du premier pas, abordé ou essayé d’aborder la Comédie-Française, où il