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Page:Faguet - Voltaire, 1895.djvu/139

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CHAPITRE VI

LE CRITIQUE.

Voltaire était né avec l’idolâtrie du siècle de Louis XIV, comme nous avons eu déjà l’occasion de le remarquer. Nous l’avons vu recueillir avec ardeur les renseignements sur le « grand siècle » que lui donnaient M. de Caumartin, M. l’abbé de Châteauneuf, M. l’abbé de Chaulieu, M. le marquis de La Fare. Nous l’avons vu, tant dans la Henriade que dans le Siècle de Louis XIV, tracer de l’époque de Louis le Grand le tableau le plus complaisant et le plus magnifique.

Il faut savoir que ceci ne laisse pas d’être une « particularité » étant donné la date de naissance de Voltaire. Quand il entrait dans sa vingtième année, il était à peu près seul de son avis en cette matière. Les historiens nous font connaître la réaction violente contre le gouvernement et la personne de Louis XIV qui précéda sa mort et surtout qui la suivit. Cette réaction s’étendit de sa personne et de sa politique à l’esprit même qui avait régné de son temps. La littérature du temps de Louis le Grand était fort peu en faveur vers 1715. Le goût des écrivains de cette époque pour l’antiquité était tourné en ridicule, et aussi leur goût pour la poésie. Montesquieu, Lamotte, bien d’autres, disaient assez de mal des poètes et « n’y croyaient plus. » Montesquieu, à la vérité, aimait l’antiquité, mais c’était l’antiquité des