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maire », disait très finement, au contraire, Rodenbach. Mais il savait composer et il savait peindre certaines choses. Il composait fortement et lumineusement. Un peu de flottement et de « traînasseries » toujours, au milieu de ses romans toujours trop longs ; mais des débuts et des fins excellents. Songez au début de Nana et à la fin merveilleuse de Germinal, et à la fin, si prestigieuse, de la Terre. Il peignait les foules en mouvement d’une manière qui le met au tout premier rang. Rien ne vaut la descente des ouvriers, à la fin de la journée, par la rue Oberkampf, la lente coulée des voitures à travers les Champs-Élysées au retour des courses, la galopade furieuse des ouvriers révoltés dans Germinal, l’éternel va-et-vient des chevaux démontés, nuit tombante, dans le champ de bataille de Sedan, le « train blanc » de Lourdes et, à Lourdes aussi, le vent de folie extatique qui couche, relève et prosterne à nouveau la foule, avec ce cri monotone qui s’élève, s’enfle et roule dans l’air enfiévré : « Seigneur ! guérissez nos malades ! Seigneur ! guérissez nos malades ! »

Nul doute : cet homme était une manière de poète barbare, un Hugo vulgaire et fruste, mais puissant, un démiurge gauche, mais robuste, qui