Page:Falconnet - Petits poèmes grecs, Desrez, 1838.djvu/192

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gauche s’élevait un tombeau que les Éléens disaient être celui d’Endymion, un de leurs rois ; et à l’entrée de la lice se trouvait la barrière ou câble dont nous avons parlé plus haut (usplênx), et qui, en se baissant, donnait le signal aux combattans. À l’autre extrémité était l’édifice construit pour recevoir les chars et les chevaux : il était de forme elliptique et ressemblait assez à la proue d’un navire dont l’éperon ou le bec était tourné du côté de la lice. Un dauphin de bronze, soutenu par une verge de fer, en formait le couronnement. Vis-à-vis la partie opposée, l’édifice s’élargissait des deux côtés et venait se terminer en cintre. On avait pratiqué des écuries et des remises sur le devant desquelles régnait un câble qui servait à retenir les chevaux. Les loges se tiraient au sort entre les combattans et décidaient du rang qu’ils devaient occuper en entrant dans la lice. Au milieu de l’édifice était un autel de briques crues qu’on blanchissait à chaque olympiade, et sur cet autel un aigle de bronze, les ailes déployées : par le moyen d’un ressort, cet aigle s’élevait et se faisait voir aux spectateurs, en même temps que le dauphin, qui était à l’éperon, s’abaissait et descendait jusque sous terre. À ce signal, on lâchait le câble qui retenait les chevaux dans leurs loges, et aussitôt les combattans s’avançaient vers le milieu de l’enceinte et se rendaient vers l’éperon, où ils prenaient le rang que le sort leur avait assigné. Alors tombait l’autre câble (usplênx) qui formait la véritable barrière, et à ce second signal ils entraient tous ensemble dans la carrière pour disputer la victoire.

L’espace qui se trouvait entre ces deux parties formait la lice ; elle était fermée à droite et à gauche par un mur à hauteur d’appui. Le côté droit, en parlant de la barrière, était plus allongé que l’autre, sans doute pour faciliter auprès de la borne le tournant de plusieurs chars courant à la fois. Ce côté regardait la plaine, l’autre s’appuyait sur la colline Cronium. Toute la lice, en y comprenant le gymnase, les gradins des spectateurs, etc., avait environ quatre cent cinquante pas de longueur sur à peu près cent vingt de largeur. Elle n’était pas absolument droite, mais un peu sinueuse, resserrée en quelques endroits ; le sol en était inégal et plein de petits tertres qui augmentaient la difficulté des courses. Aux trois quarts de la lice, où se trouvait apparemment la plus grande élévation du terrain, étaient, du côté de la plaine, les places des directeurs des jeux, qui consistaient en sièges de pierre exhaussés à la hauteur du mur : ils s’y rendaient par un chemin dérobé. Vis-à-vis on voyait un autel de marbre blanc avec la statue de Cérès Chamyne. Des deux côtés, dans toute la longueur, au-dessus et au-dessous de ces premières places, étaient celles des spectateurs ; les plus commodes étaient réservées aux personnes de distinction ; et à l’égard du peuple, qui accourait en foule à ces fêtes, il se plaçait où il pouvait sur la colline appelée par Pindare le Promontoire de Saturne ou Cronium ; elle bornait la lice d’un côté et formait un amphithéâtre capable de recevoir une grande multitude de spectateurs.

La lice, prise dans toute son étendue, servait aux courses de chevaux et de chars et se nommait l’hippodrome[1]. Les courses à pied se faisaient alors dans la partie de cette même lice qui commençait à la barrière des athlètes et s’étendait jusqu’aux sièges des directeurs des jeux et à l’autel de Cérès, partie qui conserva le nom de stade proprement dit. L’espace qui se trouvait entre ces sièges et l’autel servait vraisemblablement aux exercices qui ne demandaient pas un vaste emplacement ; les orateurs et les poètes s’y assemblaient pour réciter leurs ouvrages, car les musiciens combattaient dans le bois sacré, où les échos favorisaient l’harmonie de leur voix et de leurs instrumens. Enfin à l’extrémité de l’hippodrome, sur la gauche, était la borne autour de laquelle les chars et les chevaux montés par des cavaliers tournaient plus ou moins de fois, suivant l’espèce de combat. Vis-à-vis la borne, dans l’angle du même côté, s’élevait sur un autel de figure ronde la statue du génie Taraxipups (taraxis, épouvante ; ippôn, des chevaux); de sorte que les chevaux, en tournant dans un espace assez étroit, passaient nécessairement entre la borne et l’au-

  1. On trouve dans Diodore de Sicile (IV, 14) que l’hippodrome, séparé du stade, était à une certaine distance du Cronium et de l’Alphée. Lucien même prétend qu’il était situé à deux stades, dans la plaine, à l’orient d’Olympie. Quoi qu’il en soit, comme il n’y a rien de bien précis à cet égard dans la plupart des auteurs anciens, et qu’il nous a paru fort possible que les courses de chevaux et de chars pussent avoir lieu dans le stade, nous n’avons pas cru devoir, dans cette dissertation, distinguer le stade et l’hippodrome comme deux monumens séparés. Cependant, pour concilier les deux opinions, nous avons tracé, à la fin de ce volume, un plan d’Olympie, dans lequel l’hippodrome est à quelque distance du stade. Ceux qui prétendent qu’on ne doit pas séparer l’un de l’autre rapporteront au stade tout ce que nous disons de l’hippodrome.