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Page:Farley - Jean-Paul, 1929.djvu/56

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JEAN-PAUL

À cette heure, il ne vend pas, il achète. Il achète des cahiers de traduction, de vieux devoirs, tout ce qui pourra lui servir ; il fait ses provisions.

Pendant que se poursuit le négoce, les gens moins mercantiles tuent le temps à causer. Chaque classe a son « coin ». La Rhétorique s’installe près de la porte de sortie qui donne sur la terrasse. Au début de l’année, il y a toujours une prise de possession officielle. C’est là que Jean-Paul est assis, un peu en marge du groupe qui bavarde et qui se permet les réflexions les plus cocasses sur les passants.

— Eh ! regardez donc, dit Lafleur, le grand Vincent qui se pavane !

Or, il faut savoir que le grand Vincent est un vétéran de la maison. Il a « bloqué », Dieu sait combien de fois ! il a quitté le Collège après sa rhétorique, il est revenu, a repris deux fois sa philosophie. On espère qu’il finira par finir. Et Lafleur, pour amuser Jean-Paul, rappelle que, lorsque Vincent se présenta aux examens du baccalauréat, le sujet du devoir français était une lettre de saint Grégoire de Nazianze à l’Empereur Julien. Le grand naïf avait poliment commencé son épître par l’apostrophe : « Mon cher Julien l’Apostat ». Comme dit l’Écriture : « On donne à celui qui a ». Plus d’une bourde est mise à son dossier, qui peut-être ne lui appartient pas. Par exemple, il aurait traduit ce texte de César :