Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/197

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contre vous, et c’est moi qui vous gagnerai… pour vous rembourser !…

Elle eut un frémissement de colère et voulut se lever. Mais au même instant, les mots tentateurs la retinrent :

— Faites vos jeux !…

Alors, par-dessus son épaule, elle regarda Fougères. Il la guettait, résolu, prêt à riposter à son geste de joueuse. Elle vit le portefeuille qu’il entr’ouvrait…

Une exaspération la prit. Deux billets de mille francs lui restaient encore, et huit plaques d’or. Elle poussa furieusement le tout :

— À cheval : Noire et Couleur !

Fougères n’hésita pas le temps d’un éclair :

— À cheval : Rouge et Inverse !

Et il lança ses deux billets à lui, et il y ajouta toute la réserve de son gousset et de sa bourse, quarante louis précisément. Les deux masses opposées étaient égales.

Mademoiselle de Retz se tourna vers son amant. Leurs regards, ennemis soudain, se croisèrent. Ce fut un instant singulier, sadique en quelque sorte. Fougères lui-même, quoiqu’ayant agi avec raison, souhaita tout d’un coup, impétueusement, férocement, humilier cette volonté rivale de la sienne, l’abattre, et faire pleurer ces yeux étincelants qui le bravaient… en même temps qu’une sensualité ambiguë et mystérieuse s’insinuait en lui, et le fouettait d’un désir brusque, tout proche de la volupté !… Sensation merveilleuse et brève… La seconde d’après, ressaisi déjà par l’anxiété matérielle du combat, Fougères songea :