Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/20

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cellule. L’abbé ouvrit les deux battants tout grands. Et, revenant vers sa pénitente :

— Eh bien ? – répéta-t-il.

Mademoiselle Dax, cependant, avait souri :

— C’est vrai, – dit-elle. – J’ai dit oui. Je crois que je serai très heureuse avec M. Barrier… et je l’aime déjà beaucoup…

Elle s’arrêta, hésita deux secondes :

— Seulement…

— Seulement quoi ?

— Seulement… j’ai peur que lui… ne m’aime pas… pas assez… pas comme je voudrais…

Le prêtre, cette fois, s’irrita :

— Pas comme vous voudriez ? Comment voulez-vous donc être aimée, Alice ?

Elle rougit. Sous sa peau mate de brune, le sang transparaissait couleur de pourpre sombre. Elle balbutia :

— Je ne sais pas…

Puis, rassemblant son courage :

— Je ne sais pas au juste… Mais, je voudrais qu’on me parlât doucement, sans me gronder, sans me dire tout le temps des choses méchantes… je voudrais être un peu gâtée, câlinée… Oh ! père ! quand j’avais dix ans, juste avant ma première communion, on m’a mise en pension pendant six mois, vous vous souvenez ? Et là, mes compagnes m’aimaient, mes maîtresses m’aimaient… d’un amour très bon, très tendre… on jouait avec moi, on m’embrassait… Voilà, voilà comment je voudrais être aimée, encore…