Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/262

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UN DUEL AU GRAND CAMP


À la suite d’une altercation bruyante, qui avait interrompu, hier soir, au Grand Théâtre, la représentation de Werther, M. B…, médecin bien connu dans notre ville, et M. F…, secrétaire d’ambassade, de passage à Lyon, se sont battus en duel, au Grand Camp, ce matin.

L’arme choisie était le pistolet. Les deux adversaires ont été blessés l’un et l’autre assez grièvement ; le docteur B… à la cuisse, et M. F… à l’épaule.

On a pu toutefois les transporter chez eux sans accident, et leur état est aussi satisfaisant que possible.

M. Dumas, commissaire de police, a ouvert une enquête et s’est transporté au domicile de chacun des combattants. Mais tous deux ont refusé de le recevoir…


— Alice ! – cria sous l’escalier la voix impatientée de madame Dax. – Alice !… Descends-tu à la fin ? Ton père est rentré.

Mademoiselle Dax descendit. Ses jambes tremblaient. Elle trébucha deux fois, et se retint à la rampe. Elle marchait d’un pas raide. À chaque marche, ses talons renvoyaient à sa nuque de petits chocs douloureux. Et un mot battait dans son cerveau comme une fièvre :

— Blessé… blessé… blessé… blessé…


— Quoi encore ? – interrogea M. Dax, bourru. – La voilà tout ahurie et pâle comme une morte !

— Elle dormait dans sa chambre, – répliqua madame Dax, hargneuse. – Et elle dort encore tout