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UN DRÔLE DE VOYAGE

— C’est comme ça qu’il faut les traiter, dit crânement Mimile.

— Et son corps, qu’est-ce qu’il est devenu ? demanda Charlot, qui voulait connaître l’affaire dans ses plus grands détails.

— Je l’ai dépouillé de son bonnet à plumes, de sa peau de bête, de ses chaussures, et je me suis revêtu du tout. Enfin j’ai traîné le cadavre du sauvage jusque dans un petit bois, qui est à vingt pas de sa cabane, et je l’ai jeté dans un trou, où il est présentement recouvert de feuilles et de cailloux.

— C’est bien fait… bien fait !… s’écria Charlot.

— Et après ? demanda Mimile.

— Je suis retourné dans sa cabane, où j’ai trouvé un pot de cirage qui m’a permis de me badigeonner le visage et les mains, comme vous voyez. Sûr qu’avec mon air de vrai sauvage je pouvais circuler sans danger, j’ai été me promener pour connaître le pays ; c’est dans cette excursion que j’ai vu et appris tout ce que je vous ai raconté tout à l’heure.

— Et tu as vu des troupeaux de lions, bien vrai ? dit Charlot.

— Je les ai même vus manger. Il y a leur maître, un grand diable, qui est arrivé là avec une énorme voiture pleine de moutons attachés par les pattes, et qui les leur a distribués. Les lions avançaient gravement l’un après l’autre, et il leur jetait à chacun un mouton à la tête. Les bêtes féroces se sauvaient ensuite avec leur proie, et se mettaient à la dévorer dans un coin en poussant des rugissements de joie. C’est très-gourmand, les lions.