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madeleine bouvart.

La cannonnade mêlait ses notes basses aux crépitements de la fusillade, et la mort semblait planer suspendue au haut de l’aile de la tempête qui passait toujours, emportant dans ses replis l’année qui finissait et mêlant à la poussière de ses vanités beaucoup de sang et beaucoup de sanglots.

Il en fut ainsi jusqu’à la matinée ; puis tout se refit paix et silence.

Québec était sauvé des horreurs du sac et du pillage.

Dans la journée, on déblaya la neige autour des morts.

Presqu’au pied de la barricade de Près-de-Ville, on trouva le général Montgomery, tout ensanglanté et tout roidi par le froid. À ses pieds gisaient onze cadavres, et parmi eux une femme qui avait eu l’épaule arrachée par un boulet.

C’était Madeleine Bouvart.

Elle était morte pour une grande cause, en priant Celui qui pardonna sa sainte patronne, la blonde Madeleine de la Thébaïde.

Dieu, sans doute a su la juger plus haut que les hommes ; ceux-ci lui donnèrent l’oubli des vivants.

Carleton négligea l’humble nom dans ses dépêches ; Québec ne fut pas reconnaissant, et l’histoire est restée muette sur l’héroïsme de la pauvre femme qui, sans guide, sans protection, sans conseil, ne trouva