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histoire de tous les jours.

Qu’il fût joyeux, malade ou peu disposé, il fallait chaque matin recommencer à remplir ce tonneau des Danaïdes.

Le grand secret de cette énergie se perdait dans l’avenir de Noémie. Paul voulait en faire ce qu’avait été sa mère, une femme pieuse, dévouée, simple de goût, et songeant plutôt à semer sous ses pas l’affection et le bonheur qu’à plaire, babiller et poser.

Pour arriver à ce but, il s’était identifié au sacrifice, et devant la sœur, le frère était disparu.

Il fallait le voir, l’entendre prononcer son nom pour se rendre compte de l’étendue de cette affection. Deux heures passèrent à bâtir des rêves d’avenir. Noémie en était l’objet, et cette causerie magique eut pour effet d’infiltrer à Paul une verve toute nouvelle.

Il fut superbe d’éloquence, d’activité, ce jour-là et les suivants. Les personnes du comté doivent s’en souvenir encore. Malgré certaines influences à craindre, le moment de la nomination arrivé, l’élection fut enlevée par acclamation.

Le soir de cette journée mémorable, j’entendis M. le député Bour dire à Paul, en lui tapant sur l’épaule :

— Jeune homme, votre avenir est assuré ; j’aurai l’œil sur vous.