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le baiser d’une morte.

Mais, mon pauvre Mathurin, l’homme est sujet à errer ; c’est l’Écriture qui le dit, et ma mère, au lieu d’être attendrie se montra plus tenace que jamais.

Alors, le désespoir dans l’âme, je me résolus à quitter la ville, et m’en vins m’établir ici, sur le modeste emplacement où nous veillons ce soir. Te dire tous les instants de bonheur passés sous le toit de cette maisonnette, en tête-à-tête avec mes amours et les chefs-d’œuvre des grands maîtres, serait au-dessus de mes forces. Qu’il me suffise de te confier que j’ai joui ici de toutes les joies de la famille, que Dieu daigne accorder sur terre aux hommes de bonne volonté.

Mon jardin suffisait à couvrir nos petites dépenses d’au jour le jour. Ursule savait tricoter, faire la cuisine, travailler au métier, et, comme elle me l’avait promis, à nous deux, nous faisions ce que nous voulions de la misère.

Nos jours de tranquillité passaient sans que nous les comptions, lorsque tout-à-coup, un matin, le maître de poste me fit remettre une lettre toute cachetée de noir.

Elle me venait du notaire de Charlesbourg qui m’annonçait que ma mère, ma pauvre mère, venait de mourir loin de moi, loin de ceux qui n’avaient jamais cessé de l’aimer ; cette triste nouvelle était accompagnée de son testament.

Par ce papier, j’étais institué légataire universel de tous les biens meubles et immeubles de dame Josephte le Chasseur ; ces biens comprenaient la maison où elle