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le père michel.

d’un côté de son fourreau de bayonnette, et de l’autre d’une petite canne qu’il faisait tournoyer au bout du bras, comme s’il se fût agi de chasser un essaim de moustiques.

La grosse voix du capitaine Boilard n’était rien auprès des aménités que nous disait ce sous-officier, et c’est là, dans cette cour de l’ancien collège des Jésuites, que je vis bien que cette politesse exquise entre militaires, dépasse rarement le sergent-major et qu’elle est toujours un mythe pour le pauvre soldat.

Néanmoins, je n’étais pas trop gourmandé ; là comme au moulin, je tenais à ce que l’on fût content de moi.

Je rattrapai les plus forts, et un beau matin, un grand anglais, à favoris roux, le lorgnon sur l’œil et la tabatière à la main, s’en vint nous dire, après nous avoir inspectés, qu’il était fier de notre escouade, tellement fier qu’il allait donner des ordres pour nous faire embarquer le soir même sur le brigantin du capitaine Lagueux, et nous expédier à Montréal pour de là être dirigés sur le corps commandé par M. de Salaberry.

Nous mîmes trois jours à nous rendre à destination ; ce qui me permit d’écrire une longue lettre à Marguerite, et bien m’en prit ; dès le débarquement on nous dirigea à l’Acadie, où mon bataillon venait de se tirer quelques coups de fusil, avec les Bostonnais.