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LES ÎLES DANS

voix, les marsouins et les poursilles venaient prendre leurs ébats jusque dans la rade de Québec ; aucun de ces souffleurs ne se hasarderait maintenant au-delà de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. En 1720, Tadoussac était encore remarquable par la pêche de la baleine. Qui, de nos jours, peut se vanter d’avoir harponné l’un de ces cétacés, dans les eaux de l’ancien moulin Baude ? Enfin, l’île Rouge qui, au XVIIème siècle, était célèbre par ses pêcheries au loup-marin, ne l’est plus guère que par sa solitude et ses naufrages[1].

Quand donc nos lacs, nos rivières, nos mers et nos forêts seront-ils contrôlés par de sages règlements ? et quand donc nos parlements et nos conseils d’états se mettront-ils dans la tête cet incontestable axiome :

— Légiférer pour les bêtes, c’est protéger l’homme.

En attendant la solution de ce problème élémentaire d’économie politique, les habitants de Brion ont fait leur deuil de la vache marine, et ont essayé de se rattraper sur l’agriculture. Quelques-uns d’entre eux étaient déjà à bord, et nous offraient leurs services. L’un surtout, M. William Didgewell, insistait pour nous mener à sa métairie qui se trouve à un mille et demi dans l’intérieur, nous invitant à venir y goûter du lait, des gâteaux de sarrasin, et à nous laisser aller aux douceurs de la vie pastorale. Cette proposition fut acceptée de grand cœur,

  1. Au mois de juin, M. Abraham avec deux de ses gendres, s’en alla pour la première fois à la pêche des loups marins ; il en prit la veille de la Saint-Jean quarante à l’île Rouge, et ilen fit six barriques d’huile. Journal des Jésuites.