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LES ÎLES DANS

lité aux camarades, restés en possession des rochers qui sont encore debout aujourd’hui. De même que Cartier, Champlain trouve en passant par là, « telle quantité d’oyseaux appelés tangueux qui ne se peut dire de plus : les vaisseaux, quand il fait calme, avec leurs batteaux : vont à ces îles, et tuent de ces oyseaux à coups de bâton en quantité qu’ils veulent[1] »

Espèce de citadelle, accessible que par escalade, et continuellement rongée par la mer, le Rocher-aux-Oiseaux dépasse, comme aspect, comme étrangeté, toutes les descriptions que ces voyageurs célèbres en ont fait. Longue de 770 verges, large de 270, couvrant une superficie de sept acres et trois quarts, et présentant du côté du sud un précipice perpendiculaire de 80 pieds, qui atteint 114 pieds du côté du nord, l’île principale est couverte de pingouins, d’alques à bec en rasoir, de guillemots, de fous de Bazan et de grands macareux du nord. Ils y planent, y pêchent, y couvent et y vivent par millions. Partout, leurs nids couvrent la croupe du brisant, qu’à une lieue en mer, surtout par un clair de lune, on prendrait pour un rocher couvert de neige, — tant il est tapissé de blanc duvet. À trois arpents de cette république ailée, ces oiseaux abasourdissaient déjà notre équipage de leurs cris., Nous les voyions à tout instant, tournoyer autour de l’île, prendre terre après quelques minutes de valse fantastique, et s’accroupir sur leurs nids qu’ils retrouvent sans hésiter, au milieu de cet inextricable fouillis. À l’époque de la couvaison, ces derniers sont en si grand nombre, qu’ils font ressembler la cime

  1. Œuvres de Champlain, p. 1084. Edition Laverdière.