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LES ÎLES DANS

La lune, en éclairant ces lieux impitoyables,
Découvre avec horreur ces restes lamentables,
Que les flots irrités se disputent encore.

C’est là que cette barque en sa course nocturne
Va cueillir en passant la troupe taciturne
Qui semble maintenant à son bord se mouvoir.
Une flamme bleuâtre à demi les éclaire,
Et jamais la rosée, au morne cimetière,
Ne tomba sur des fronts plus livides à voir.

C’est à l’Île-des-Morts qu’un vent fatal les guide !
C’est-à-l’Île-des-Morts que s’avance rapide
Cette ombre de vaisseau par des ombres conduit
Des squelettes sont là, déroulant à la brise
La sinistre voilure ; une forme indécise
Debout veille à la poupe, et la barque obéit !

Fuis, ô barque terrible ! Ô barque de mystère !
Fuyez pendant que l’ombre enveloppe la terre.
Fantômes de la nuit, rentrez vite au cercueil,
De peur qu’à votre aspect la jeune et tendre aurore
Ne dépouille son front de l’éclat qui le dore,
Et se cache à jamais sous un voile de deuil.

Quel contraste entre le Napoléon III et ce vaisseau fantôme que venait de faire surgir, à la vue du Corps Mort, la puissante imagination