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LE GOLFE SAINT-LAURENT.

sur le gaillard d’arrière. Il aperçut la mer déferler et se briser sous le vent, au moment où l’Edgar faisait son abatée ; et tout effrayé, il se précipita dans les appartements de l’amiral, en lui criant :

— Sir Hovenden ! nous sommes entourés de récifs !

L’amiral se prit à plaisanter M. Goddard sur sa frayeur ; lui assura que le capitaine de sa frégate, M. Paddon, était encore plus compétent pour les choses de la mer qu’un officier d’infanterie, et lui souhaita le bonsoir.

Le fantassin ne se tint pas pour battu. Pendant cette conversation avec son supérieur les brisants avaient grandi : un tumulte terrible se faisait sur le pont, et oublieux de l’étiquette pour ne plus songer qu’au salut de tous, le capitaine Goddard rentrant de nouveau dans le carré de Sir Hovenden, le supplia au nom de Dieu, de monter sur son banc de quart.

L’amiral s’y rendit gaiement — in gown and slippers — en robe de chambre et en pantoufles.

L’Edgar était à la veille de talonner. Tout le monde avait perdu la tête ; personne ne savait où était allé Paradis. La frégate faisant chapelle s’était laissée coiffer, et avait rejeté les brisants sous sa hanche, pendant que pour comble de malheur, le capitaine Paddon hors de lui, faisait dégager une ancre qui dérapa de suite, et qu’il fallut couper immédiatement.

La lune sortit alors du brouillard, et montrant distinctement la côte Nord, permit à l’amiral de rassurer un peu ses hommes. Sur ces entrefaites, Paradis que l’on avait éveillé, fit transmettre l’ordre de hisser toutes les voiles. Il fallait sortir de là couvert de toiles, ou chavirer.

L’Edgar, sous la main ferme du capitaine