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duction) en prenant, eux-mêmes, place dans les rangs des travailleurs, au même titre que tous les autres, ou alors, maintenir le monopole du Pouvoir et de la Dictature, en s’appuyant sur d’autres classes sociales. Les bolcheviques ont choisi la seconde voie. Ils établirent, par la « N. E. P. », la base sociale qui leur faisait défaut, ayant ainsi créé des classes privilégiées économiquement, partant, intéressées à la conservation du pouvoir communiste. Quant aux ouvriers et aux paysans, ils restèrent dans leur situation habituelle : des « classes travailleuses ».

Dans le domaine de la politique internationale, le bolchevisme manifeste les mêmes tendances et méthodes d’organisation, qui caractérisent son activité politique en Russie : il aspire à soumettre à son centre le mouvement ouvrier international et, par son intermédiaire, toutes les classes de la société contemporaine.

La victoire aisée qu’il avait remportée sur le capital agraire et industriel en Russie, ainsi que la situation générale révolutionnaire en Europe, lui inspirèrent, au début, la foi en l’effondrement très proche du système capitaliste en toute l’Europe et l’Amérique, et le remplirent d’espérance en son hégémonie mondiale.

Le « Comintern » et le « Profintern » furent créés en qualité d’organes appelés à réaliser les directives du Comité Central dans le mouvement révolutionnaire international. Le devoir direct de ces deux institutions devait être : l’établissement de l’hégémonie du bolchevisme sur le mouvement révolutionnaire de l’Europe, de l’Amérique et d’autres pays.

La tactique des « poutchs », adoptée pendant plusieurs années en Allemagne, en Esthonie, en Bulgarie) ; celles des scissions produites dans les partis socialistes et dans le mouvement ouvrier professionnel ; celle, plus récente, du « contact » et du « front unique », toutes ces manœuvres ne furent que des manifestations de la stratégie politique générale du Comité Central du parti bolchevique.

Mais au fur et à mesure que les bolcheviques stimulaient le développement du capitalisme en Russie et renforçaient ce dernier, au fur et à mesure que des contradictions survenaient et se précisaient ainsi entre leur système social et les intérêts réels des masses laborieuses, se transformant en de véritables antagonismes sociaux, — la politique internationale des bolcheviques subissait des modifications profondes.

Le centre de cette politique se déplaçait petit à petit du milieu prolétarien vers celui de la bourgeoisie internationale. Depuis 1925, les bolcheviques mènent avec cette dernière des pourparlers sérieux tendant à leur incorporation dans le réseau général des États capitalistes. La base des pourparlers n’est autre que le renoncement complet aux « pêchés d’octobre » dans la politique intérieure et internationale du pouvoir des Soviets.

Dans la politique intérieure, ce renoncement a commencé, il y a longtemps. Le 14e Congrès du P. C. de l’U. R. S. S. en décembre 1925, rompit les derniers liens qui attachaient encore les bolcheviques à la révolution d’octobre, en écrasant l’opposition représentée par Zinoviev, Kamenev et Kroupskaïa, et en prenant, sans plus de façon, la route de la restauration du capitalisme en Russie.

À l’heure actuelle, le bolchevisme s’appuie en Russie, à part la bourgeoisie des villes et des campagnes, sur des forces d’ordre mécanique :

Un énorme parti qui représente une organisation puissante basée sur des principes ultra-militaires, jouissant des privilèges sociaux et des monopoles, déployant un maximum d’énergie et d’activité ;

Une armée rouge magnifiquement organisée (dans le sens étatiste), armée et disciplinée, dépassant par ses qualités militaires toutes les armées du monde ;

Et une police politique (la G. P. U.), qui déploya un système d’espionnage sans précédent dans l’histoire des États, espionnage pénétrant dans tous les pores de l’existence des masses laborieuses de l’U. R. S. S.



Telles sont la face et la route historique du bolchevisme.

Ce mouvement provint des aspirations politiques et étatistes de l’ « intelligenzia » démocratique. Cherchant à se rendre maître de la puissance révolutionnaire des masses travailleuses, ce fut à contre-cœur qu’il paya le tribut à leurs aspirations socialistes et à leurs mots d’ordre révolutionnaires. Ayant réussi, dans la révolution, à se faire cette situation de maître, il revint à son point de départ, et restaura l’édifice de la domination de classe, sur la base d’un asservissement forcé et d’une exploitation imposée des masses travailleuses. — P. Archinoff.


BOMBE. n. f. (italien bomba ; du latin bombus, fracas). Le mot bombe signifiait simplement tout d’abord un projectile creux en forme de boule, plein de poudre et muni d’une mêche qui le fait éclater en communiquant le feu à la charge. Par extension, le mot bombe sert aussi à désigner, aujourd’hui, un appareil explosible, de forme et de composition variables, qui se lance ou se place à la main. Les bombes datent du xvie siècle, mais ne sont plus employées dans l’artillerie moderne où elles ont été remplacées par les obus. On appelle encore bombes les engins explosifs que lancent les avions, les dirigeables et qui peuvent atteindre un volume et un poids considérables. — Il fut une époque où la bombe était l’armée préférée des terroristes et des anarchistes propagandistes par le fait (voir Attentat. Propagande par le fait). Lorsqu’un gouvernement tyrannique interdit, en effet, toute manifestation libre par l’écrit ou par la parole, la violence est le seul moyen de protestation qui soit laissé aux révolutionnaires. Et ils sont obligés d’y recourir — malgré qu’ils répugnent à son emploi — puisque c’est par une violence pire qu’on les bâillonne. D’où le terrorisme et l’emploi de la bombe, par exemple, chez les nihilistes russes d’avant la révolution de 1917. Parmi les attentats célèbres où les terroristes russes firent emploi de la bombe, citons : le 1er mars 1881, l’engin de Grinevitzky, qui frappa mortellement le tsar Alexandre II. (Voir Attentat. Explosifs.)


BONHEUR. n. m. En tout temps et en tous lieux, les humains ont recherché le bonheur avec autant d’ardeur que de persévérance. Cette poursuite du bonheur a ce double caractère : la constance et l’universalité ; la constance, car jamais on n’a eu l’occasion de rencontrer un individu ou une collectivité faisant fi du bonheur ; l’universalité, car, de l’orient à l’occident et du nord au midi, tous les humains, sans distinction ni exception d’aucune sorte, ont cherché et cherchent à être heureux. Cette constatation, qui me paraît hors de doute, me conduit à estimer que « le bonheur est le but vers lequel tendent tous les efforts, toutes les aspirations et tous les espoirs des vivants. »

On pourrait objecter que l’existence de certaines personnes donne un démenti à cette règle générale et en démontre l’inexactitude. Je réponds que cette objection procède d’une observation superficielle et rudimentaire, s’arrêtant aux apparences qui, en l’espèce, font illusion et masquent la réalité. Exemple : je suppose une jeune fille bien portante, belle et riche. Santé, beauté, fortune, elle a le privilège de posséder ces trois avantages qui, aux yeux de l’immense majorité, sont les éléments constitutifs d’une vie heureuse. J’ajoute qu’elle est chérie de ses parents dont elle est l’idole et qu’elle a inspiré un amour passionné à un jeune homme, possesseur,