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Aujourd’hui, l’humanitarisme tend à sortir de la nébuleuse sentimentale, s’affirmant comme conception, comme doctrine basée sur éléments réels d’évolution biologique de l’entière espèce humaine — comme sur l’entier progrès de la civilisation et de l’esprit humain. Cet essai entrepris par un petit nombre est considéré utopique même par les socialistes. Nous rappelons à ceux-ci ce qu’était le socialisme il y a 70-80 ans. Les manifestes rédigés alors par quelques idéalistes dans une modeste chambrette, dominent et tourmentent aujourd’hui le monde. Maintenant que le socialisme commence à être réalisé, nous voyons que — malgré sa lutte au nom des idéaux humanitaires — il les ignore en grande partie, autant que la bourgeoisie qui se croit le défenseur « du droit et de la civilisation ».

Toute doctrine et tout mouvement naît au moment fixé par l’évolution cérébrale, économique ou spirituelle de l’humanité. L’humanitarisme paraît maintenant comme une doctrine (et non pas un dogme) qui embrasse tous les autres idéaux socialistes, esthétiques, scientifiques et religieux, harmonisés et contrôlés d’après les principes positifs résultant de l’étude d’évolution de toute l’espèce humaine. Car il y a une vérité qui perce toutes les situations locales et toutes les idéologies restrictives. Malgré ses erreurs guerrières, ses luttes nationales, ses conflits de classe, l’humanité tend vers cette pacification imposée par son origine et son but mêmes — essentiellement pacifiques. Elle aspire à cette internationalisation qui n’est qu’une nouvelle expression de la solidarité ancestrale, et une nécessité résultant de la loi du progrès cérébral, technique et cultural de l’homme moderne.


Indiquons en peu de mots la genèse de l’humanitarisme d’après-guerre. Dans la Biologie de la Guerre (parue en 1917), à laquelle Romain Rolland a consacré une longue étude dans Les Précurseurs, son auteur, le professeur George F. Nicolaï, a démontré les deux axes de l’humanitarisme : le pacifisme et l’internationalisme ; mais il ne nous a pas démontré l’humanitarisme même. Le Décalogue de l’Humanité, inclus dans la Biologie de la Guerre, contient une vingtaine de lignes de sentences morales, résultant de la constatation scientifique de ces deux lois de progrès. Comme naturaliste, G.-F. Nicolaï s’est limité au domaine biologique ; il n’a pas voulu étendre ses recherches au domaine social. Son but était de donner au pacifisme et à l’internationalisme une base inébranlable ; c’est pourquoi il voulut prouver leur existence biologique. Il réussit à rattacher à ces deux axes de l’humanitarisme la conception de « l’organisme de l’humanité », conception assez vieille, qu’il rajeunit par la précision des faits naturels et par la découverte des tendances d’évolution de l’espèce humaine.

Ceux qui furent pénétrés de l’immense importance des vérités proclamées par Nicolaï, sentirent le besoin d’avancer encore. Du domaine biologique ils durent passer au domaine social ; ce n’est qu’ainsi que ces vérités pouvaient devenir fertiles. Voilà pourquoi, après avoir résumé dans une édition populaire La Biologie et la Guerre (1921), j’écrivis L’Humanitarisme et l’Internationale des Intellectuels, préfacé par G.-F. Nicolaï. Ce livre est la suite naturelle de la Biologie de la Guerre.

L’humanitarisme devait être transplanté dans d’autres domaines sociaux, dans le domaine technique, économique, cultural, esthétique ; mais ses racines résident dans les vérités biologiques. L’humanitarisme sentimental des vieilles religions est aujourd’hui une cruelle erreur. L’humanitarisme moderne ne peut avoir d’expression pratique, si son contenu n’est pas présenté sous une forme organisée. Évidemment, sa racine réside dans la conscience individuelle. Sa meilleure propagande est celle d’individu à individu, privée du formalisme qui paralyse tant de cercles, tant de groupements

et fédérations. L’Appel aux Intellectuels libres et aux Travailleurs éclairés, que j’ai lancé en 1923, en sept langues, proclama « les principes humanitaristes », indiquant que le dernier but des cercles humanitaristes est de former des citoyens de l’humanité.

Néanmoins, pour accroître, guider et hâter d’une manière consciente l’influence de l’humanitarisme un instrument est absolument nécessaire : sans la main qui la réalise, l’idée est morte. Dans la seconde partie de mon livre L’Humanitarisme et l’Internationale des Intellectuels, étudiant les mouvements d’après-guerre des intellectuels, je suis arrivé à la conclusion que, seule, l’Internationale des Intellectuels peut être l’expression pratique de l’humanitarisme, tout comme l’Internationale des Prolétaires est l’instrument réalisateur du socialisme. Cette Internationale existe maintenant sous forme fragmentaire, en divers groupements, ligues et fédérations, dont chacune lutte pour quelques-unes des idées humanitaristes. Aucune de ces organisations existantes n’a encore présenté les idées humanitaristes comme conception intégrale. La tendance vers cette fin est évidente, car les organes de l’Internationale des Intellectuels existent et les éléments d’une doctrine humanitariste ont déjà été formulés ; c’est cette doctrine-là que j’ai tâché d’esquisser dans mon livre. Les Principes Humanitaristes résument L’Humanitarisme et l’Internationale des Intellectuels. Quelle que soit la forme dans laquelle l’Internationale des Intellectuels basée sur l’humanitarisme, sera réalisée. Les Principes Humanitaristes synthétisent pour leur auteur les vérités qui dureront, autant que cette humanité martyrisée continuera à lutter pour ses idéaux scientifiques, techniques, économiques, esthétiques et moraux. — Eugen Relgis.


HYMNE n. m. (du grec humnos, chant). Chez les anciens, l’hymne était un poème en l’honneur des dieux ou des héros. Dans la liturgie catholique, c’est un poème religieux que l’on chante à l’église. En général, un hymne est une pièce de vers dans laquelle l’auteur exprime des sentiments d’exaltation et d’admiration. Nous avons trop entendu, jusqu’aujourd’hui, des hymnes aux dieux, aux héros, à la Patrie ; trop d’hymnes de stupidité ou de haine ont retenti par le monde. Si les hommes raisonnables composent ou chantent des hymnes, ce sont des hymnes d’amour, de fraternité et de révolte — et ces hymnes-là honorent davantage la poésie et l’humanité.


HYPERBOLE n. f. (du grec huper, au delà, et bollein, jeter). Figure de rhétorique qui consiste à exagérer pour impressionner l’esprit. L’hyperbole est une grande ressource en poésie et en littérature. Malheureusement, sur le plan social, c’est un grave défaut qui est cause de bien des maux. Nous aimons nous créer des idoles, voir de grands hommes où il n’y a qu’homme simplement. Nous allons, ainsi, vers beaucoup de désillusions,

La foule voit des grands chefs, des gouvernants ou des politiciens de génie — alors qu’il n’y a que généraux assassins, politiciens combinards et retors prêts à toutes les crapuleries pour arriver ou se maintenir au Pouvoir. Au reste, les journalistes savent de mains de maîtres manier l’hyperbole pour encenser les hommes qui financent leurs feuilles ; et le pire, c’est que le lecteur arrive très souvent non seulement à croire, mais encore à amplifier l’hyperbole.

En géométrie, l’hyperbole est le lieu des points dont les distances à deux points fixes ont une différence constante.


HYPOCRISIE n. f. (du grec hupokrisis, rôle joué). L’hypocrisie consiste à affecter une vertu, un sentiment louable qu’on n’a pas. Hélas ! Combien l’hypocrisie joue encore un grand rôle dans notre siècle. Le « bon »