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impulsif, c’est l’être pondéré ; c’est-à-dire celui qui sait, en toute circonstance, garder son sang-froid.

Dans, le domaine social, les anarchistes sont des impulsifs, en ce sens qu’ils donnent l’impulsion au mouvement révolutionnaire ; dans le domaine moral, ils doivent être des hommes pondérés, car ils doivent toujours garder leur sang-froid à seule fin de n’accomplir, autant que faire se peut, que des actes conscients et raisonnés.


IMPULSION n. f. (du latin impulsus, poussé). Mouvement communiqué par le choc d’un corps solide ou la dilatation d’un fluide (la vapeur donne l’impulsion à la locomotive). Force qui pousse à faire un acte. Le plus souvent l’impulsion est une chose irraisonnée, instinctive, qui est loin, de produire de bons résultats. Céder à son impulsion dans une dispute, dans une discussion, dans certains cas déterminés, c’est n’avoir plus conscience de sa personnalité propre et obéir à un instinct querelleur et batailleur qui, hélas, existe encore à l’état latent chez la plupart des hommes. Cependant il est des cas où on doit écouter son impulsion. Les personnes d’un certain âge ou bien que la vie a désabusées, essaient toujours de retenir les jeunes dans ce que la jeunesse a de meilleur : l’opposition spontanée, la révolte. Devant certains actes d’injustice, devant certains faits écœurants, notre impulsion nous incite à manifester hautement notre colère et notre indignation. Cette impulsion, provenant de sentiments nobles et généreux, est une impulsion bonne à suivre.

Au sens figuré, on appelle impulsion la force donnée à des idées par une propagande ou certains hommes. C’est ainsi que l’on dira que Bakounine et la Fédération Jurassienne donnèrent l’impulsion à l’idéal anarchiste par leur propagande antiautoritaire et anticentraliste. Les anarchistes, par leur constante agitation, par leur propagande systématique, par leur révolte permanente contre toute autorité, donneront l’impulsion à la classe ouvrière et l’amèneront à la révolution qui la libèrera de cette sujétion dans laquelle la maintiennent les profiteurs du capitalisme et de la politique.


IMPUNITÉ n. f. Absence de punition. Un fait à remarquer dans notre Société codifiée de toutes manières, c’est qu’alors que les révolutionnaires sont impitoyablement traqués par tous les gouvernements, les agioteurs, les tripoteurs, les mercantis, les commerçants falsificateurs, les ministres concussionnaires, les hauts fonctionnaires prévaricateurs jouissent d’une impunité presque totale. Les ministres et les généraux qui envoient journellement des hommes à la mort sont aussi protégés par l’impunité.

On emploie souvent ce mot dans le sens d’immunité. (Voir les mots immunité, punition, répression).


IMPUTATION n. f. (du latin imputare, porter en compte). Inculpation, fondée ou non. Attribution d’actes blâmables. Bien souvent l’imputation n’est qu’une calomnie (voir ce mot). Combien de gens, par envie, par rancune, par haine, ont fait envoyer leurs semblables en prison, au bagne même, par des imputations qu’animait uniquement un dessein de vengeance ou de nuisibilité. Que de personnes se livrent encore couramment à des imputations sur ceux qui les entourent, provoquant ainsi des dénouements quelquefois tragiques…

Il faut se garder de faire une imputation à la légère. Il faut tenir en suspicion les imputations qui ne sont pas accompagnées de preuves évidentes, irréfragables, ne s’y livrer soi-même qu’à bon escient et sous la réserve du doute, et en dehors de toute, hostilité préconçue. Le bon sens, l’examen critique sont les premiers obstacles à dresser devant les imputations inconsidérées ou méchantes. Seules la démonstration, la lumière de la

vérité, une volonté arrêtée de défense réduiront à l’impuissance l’arme souvent empoisonnée de l’imputation ignorante, maladive ou malfaisante.


INACTION n. f. Absence de toute action, de toute activité. Dans le domaine scientifique, l’inaction n’existe nulle part. Depuis le minéral jusqu’à l’être animal, tout se meut, tout s’agite. L’air, l’eau, le feu, la terre, tout ne donne que spectacle de vitalité et d’activité continuelles. La mort même de l’être ne confère pas au corps une inaction totale. La Nature est dans un perpétuel état de gestation ; la matière engendre la matière, les fluides eux-mêmes ne sont que le champ d’activité extraordinairement dense des molécules qui les composent.

Dans le domaine social, il n’en est malheureusement pas de même. Alors que les politiciens de toutes nuances s’agitent, se démènent, complotent, s’insinuent, pour arriver à leurs fins ; alors que le patronat s’arme, se fortifie et se prépare pour la répression au moindre mouvement de revendication ; alors que tous les privilégiés font peser plus lourdement que jamais leur talon de fer sur la classe ouvrière, il en est qui restent, drapés dans leur splendide isolement, en dehors de la mêlée ; il en est d’autres, timorés, que toute action effraye ; il en est encore, résignés, qui trouvent que « cela pourrait aller plus mal ».

La classe ouvrière doit mener une lutte incessante contre ceux qui l’asservissent ; à chaque minute qui s’écoule doit correspondre un effort de propagande dans le but d’éclairer le prolétariat sur son intérêt, sur sa tâche et sur sa voie. Il faut constamment lui indiquer l’action à mener pour son émancipation et celle de l’humanité.

Les meneurs des partis politiques d’extrême-gauche exhortent véhémentement les ouvriers à l’acte de révolte, mais quand va se déclencher le mouvement, à l’heure de passer aux actes, ils disent : « Soyez calmes !, n’écoutez pas les provocateurs ! », prêchant ainsi une inaction coupable à l’instant décisif.

Par la parole et par l’action les anarchistes font constamment œuvre révolutionnaire. Ils disent aux exploités : « Défiez-vous des politiciens qui veulent bien accepter tous les profits d’un mouvement de révolte, mais qui font tout pour n’avoir pas à en supporter les inconvénients. Les discours, les protestations écrites ou verbales, les manifestations en vase clos ne peuvent, en aucune manière, amener de changement social. Seule compte l’action — conditionnée par une éducation préalable —, car seule l’action énergique et décidée fait hésiter les capitalistes, comme seule elle peut transformer la société. »

Aussi les anarchistes sont-ils combattus vivement par tous les politiciens qui se contentent de l’agitation verbale et vivent grassement de l’inaction de leurs victimes. L’inaction, c’est l’acceptation du fait accompli. Une action directe, autonome, révolutionnaire, sera seule salvatrice du monde du travail.


INAMICAL adj. Contraire à l’amitié. Ne pas avertir quelqu’un d’un danger dont on le sait menacé, ne pas l’informer des bruits malveillants qui circulent sur son compte, ne pas prendre la défense d’un camarade accusé faussement ou ne pas demander de preuves décisives de cette imputation, ne pas lui venir en aide quand il est dans le besoin, tout cela constitue des actes inamicaux. Profiter de l’absence d’un camarade pour se substituer à lui dans une affaire ou une place avantageuses, ne pas dire à un ami franchement ce que l’on pense de lui, ne pas l’avertir de ses travers pour qu’il puisse s’en corriger, ce sont encore des actes inamicaux.

L’acte inamical devient non seulement illogique, mais