Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/109

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MAS
1453

Coup d’État du 2 décembre 1851. ‒ Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République, ne pouvant être réélu en 1852, la Constitution s’y opposant, résolut de renverser l’Assemblée et de s’emparer du pouvoir. Il change l’état-major de l’armée de Paris et y place des hommes à sa dévotion. Il remplace les régiments qui tenaient garnison dans la capitale par d’autres dont les chefs étaient à lui ; enfin il place à la tête de cette armée un homme taré, méprisé, prêt à tous les crimes : le général Magnan. Il fait, dans la nuit du 1 au 2 décembre, arrêter ses principaux adversaires : le général Changarnier, Thiers, les généraux Lumorlcière, Cavaignac et Bedeau, le colonel Charras. Le colonel Espinasse investit le palais législatif et procède à l’arrestation des questeurs Le Flô et Baze. Les troupes se déploient dans tous les quartiers de Paris, cavalerie, infanterie, artillerie ; les canons chargés, les canonniers ayant en mains la mèche allumée, prêts à mitrailler les citoyens ; les soldats pourvus de cartouches, ivres et menaçants, les officiers insolents et provocants.

Dans la matinée du 2 décembre, Paris semblait une ville prise d’assaut.

Le 3 décembre, les députés républicains et les délégués des sociétés secrètes se réunissent et forment un comité d’insurrection, où étaient : Victor Hugo, Michel (de Bourges), Charamaule, Maurice Lachâtre, etc. Des barricades s’élèvent sur divers points de la capitale ; plusieurs représentants de la Montagne se mettent à la tête des combattants. Baudin, Esquiros, Mavier de Monjan, qui est blessé à la barricade du boulevard Beaumarchais ; Baudin est tué raide d’une balle au front, à la barricade de la rue Sainte-Marguerite, par des soldats du 19e de ligne, commandés par le chef de bataillon Pujol.

Le 4 décembre, la besogne du dictateur était presque terminée, mais il fallait faire sentir au peuple que le silence était de rigueur. On enlève vingt-cinq millions à la Banque ; les rouleaux d’or sont distribués aux officiers, un million est attribué à Saint-Arnaud, un autre million à Magnan ; des tonneaux de vin, de liqueurs, d’absinthe, sont mis à la disposition des soldats. L’action commence. Boulevard Poissonnière une foule compacte et inoffensive est en face des soldats. Tout à coup, sur l’ordre du colonel Lourrnel, sans provocation, sans prétexte, les soldats, ivres pour la plupart, font une décharge terrible et foudroient les infortunés qui sont devant eux, puis le bataillon ouvre les rangs pour faire place aux canons qui tirent à boulets sur les maisons !… Le pavé des boulevards et de la rue Montmartre est jonché de cadavres… On en compta quatre cents.

La Commune mars 1871 (voir Commune). ‒ Comme en 1848, la bourgeoisie massacre le peuple. Au gouvernement, le même « sauveur » : Thiers. L’armée de Versailles rentre dans Paris, le 21 mai et le massacre commence aussitôt, 90.000 Parisiens sont assassinés.

Voici, en outre, un état des travaux des Conseils de guerre, publié au début de 1875 (cité par C. Morel, dict. Socialiste) :

Condamnations contradictoires 10.137 ; condamnations par contumace : 3.313. Total : 13.450, dont 157 femmes.

Peine de mort : 270, dont 8 femmes. Travaux forcés à temps et à vie : 410, dont 29 femmes. Déportation dans une enceinte : 3.989, dont 20 femmes. Déportation simple : 3.507, dont 16 femmes et 1 enfant. Détention : 1.260, dont 8 femmes. Réclusion : 64, dont 10 femmes. Travaux publics : 20. Emprisonnement jusqu’à 3 mois : 432. Emprisonnement de 3 mois à 1 an : 1.622, dont 50 femmes et 1 enfant. Emprisonnement de plus d’un an : 1.344, dont 15 femmes et 4 enfants. Bannissement :

432. Surveillance de haute police : 117, dont 1 femme. Amendes : 9. Maison de correction pour enfants : 56 Jugements cassés : 59.286 détenus n’avaient pu être condamnés que pour port d’armes et exercice de fonctions publiques. 766 condamnés dits de droit commun l’étaient, 276 pour arrestations, 171 pour la bataille des rues, 132 pour saisies et perquisitions qualifiées vols et pillage. La révolution « cosmopolite » laissait aux mains des chefs militaires 396 étrangers seulement, la révolution des « repris de justice », 7.119 condamnés sans antécédents judiciaires, contre 524 qui avaient encouru des condamnations pour délits politiques ou de simple police, et 2.381 convaincus de crimes ou délits non spécifiés. Sur les 10.137 condamnés, 29 étaient membres de la Commune, 49 membres du Comité Central, 225’Officiers supérieurs, 1.942 officiers subalternes, 7.418 étaient des gardes et des sous-officiers.

Massacre de Fourmies 1er mai 1891. ‒ À l’occasion du 1er Mai, des manifestations eurent lieu à Fourmies (Nord), comme dans toutes les agglomérations industrielles de France. Partout des ordres sévères avaient été donnés ; armé, police, gendarmerie étaient alertés. Les prolétaires devaient une fois encore pleurer des larmes de sang sur leur impuissance.

Voici ce que dit Charles Verecque (Dictionnaire du Socialisme) : « On le sait, comme leurs camarades des autres villes, les ouvriers fourmisiens s’étaient préparés pour la manifestation internationale du travail. Ils avaient décidé un banquet populaire pour le matin, une représentation théâtrale pour l’après-midi et un bal pour le soir. Ces préparatifs n’étaient pas menaçants, mais ils apeurèrent les patrons. Ces derniers firent savoir qu’ils renverraient de leurs fabriques les ouvriers qui ne travailleraient pas le 1er Mai. Puis ils demandèrent à la municipalité de faire venir la troupe. Le 145e d’infanterie, en garnison alors à Maubeuge, vint camper à Fourmies.

Dès le matin du 1er Mai ‒ et cela pour intimider les ouvriers ‒ des charges furent opérées par les gendarme et des arrestations furent faites à tort et à travers. L’après-midi, une colonne de manifestants s’organisa pour porter à la mairie la liste des revendications ouvrières et réclamer la mise en liberté des prisonniers. Deux jeunes gens se trouvaient en tête : Giloteau, portant un drapeau tricolore, et sa bonne amie, Maria Blondeau, portant à la main un mai, c’est-à-dire une branche fleurie.

Quand les manifestants furent à deux pas de la mairie, les soldats, à l’exception d’un seul, le soldat Lebon, manœuvrèrent leurs fusils. Le crime était accompli. Pour la première fois, les fusils Lebel avaient été essayés sur des poitrines françaises. Voici les cadavres qu’on releva sur le pavé sanglant : Maria Blondeau, 18 ans ; Edmond Giloteau, 19 ans ; Émile Cornaille, 11 ans ; Gustave Pestiaux, 13 ans ; Félicie Pannetler, 17 ans ; Ernestine Diot, 19 ans ; Louise Huhlet, 21 ans ; Émile Segaux, 30 ans : Charles Leroy, 22 ans, et Camille Latour, 50 ans. »

Le 4 mai, la Chambre repoussa l’enquête par 329 voix contre 156.

Fusillades de Draveil, 2 juin et Villeneuve-Saint-Georqes, 30 juillet 1908. ‒ « C’est à Draveil, petite ville de Seine-et-Oise, le 2 juin 1908, sous le ministère Clémenceau, que les gendarmes tirèrent sur les grévistes réunis dans une salle de conférences. »

« Une manifestation contre ces fusillades eut lieu à Villeneuve-Saint-Georges, le 30 juillet 1908, ce qui donna à la police l’occasion de sévir avec violence. La cavalerie chargea. Il y eut beaucoup de blessés. Dret, du syndicat des cuirs et peaux, dut être amputé d’un bras. On apprit, plus tard, qu’un syndicaliste, nommé Métivier, chaud partisan de la manifestation, était de